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dissertation juridique sur le mariage

Les effets (personnels et patrimoniaux) du mariage: vue générale

  • octobre 23, 2020
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La famille a toujours été appréhendée par le législateur comme ne pouvant se réaliser que dans un seul cadre : le mariage.

Celui-ci est envisagé par le droit comme ce qui «  confère à la famille sa légitimité  » [1] et plus encore, comme son «  acte fondateur  » [2] .

Aussi, en se détournant du mariage, les concubins sont-ils traités par le droit comme formant un couple ne remplissant pas les conditions lui permettant de quitter la situation de fait dans laquelle il se trouve pour s’élever au rang de situation juridique. D’où le silence de la loi sur le statut des concubins.

Il y a bien un texte les concernant s’ils viennent à rompre ; mais, celui-ci est tourné vers le mariage, puisque réglant la question de la restitution de la bague de fiançailles [3] . En outre, la loi du 15 novembre 1999 relative au pacte civile de solidarité (pacs) a, certes, inséré à l’article 515-8 du Code civil une définition du concubinage [4] .

Toutefois, cette définition n’est que symbolique : elle n’est assortie d’aucun droit, ni d’aucune obligation qui échoirait aux concubins [5] .

Bien que l’on puisse relever quelques décisions audacieuses, dans lesquelles les juges ont cherché à faire application, dans le cadre d’une relation de concubinage qu’ils avaient à connaître, de certaines dispositions du régime matrimonial primaire, la jurisprudence de la Cour de cassation a toujours été constante sur ce point : les concubins ne sauraient bénéficier des effets du mariage [6] .

Excepté quelques cas marginaux [7] , leur situation n’est réglée que par le seul droit commun. Pour les couples qui choisissent de se tenir à l’écart de l’union conjugale, c’est donc un silence juridique qui les attend.

Depuis l’adoption de la loi sur le pacs, ce silence n’est, cependant, plus aussi assourdissant qu’il a pu l’être. En proposant aux concubins un statut légal, un «  quasi-mariage  » diront certains [8] , qui règle les rapports tant personnels, que patrimoniaux entre les partenaires, la démarche du législateur témoigne de sa volonté de ne plus faire fi d’une situation de fait qui, au fil des années, s’est imposée comme un modèle à partir duquel se sont construites de nombreuses familles.

En contrepartie d’en engagement contractuel [9] qu’ils doivent prendre devant un officier d’état civil ou devant notaire, les concubins, quelle que soit leur orientation sexuelle, peuvent, de la sorte, voir leur union hors mariage, se transformer en une situation juridique.

S’il s’agit là d’une profonde mutation que connaît le droit de la famille, elle doit néanmoins être relativisée. Le mariage demeure le modèle prépondérant à travers lequel le droit appréhende la famille.

Cette place centrale que le mariage occupe, encore aujourd’hui, dans l’ordonnancement juridique s’exprime par les effets qu’il emporte et qui confèrent au couple marié un statut privilégié.

À cet égard, il convient d’avoir toujours à l’esprit que le mariage ne consiste pas seulement en une union des personnes. Il consiste également en une union des biens.

Aussi, les effets du mariage sont de deux ordres. Ils intéressent :

  • D’une part , les rapports personnels entre les époux
  • D’autre part , les rapports pécuniaires entre les époux

I) Les rapports personnels entre les époux

S’agissant des rapports personnels entre les époux, l’acte juridique que constitue le mariage produit deux effets principaux à l’égard des époux :

==> Premier effet : la création de devoirs mutuels

Le mariage fait naître des devoirs mutuels qui pèsent sur les époux. Ces devoirs sont énoncés aux articles 212, 213 et 215 du Code civil.

Au nombre de ces devoirs figurent :

  • Issu de la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs, le devoir de respect vise à exprimer l’idée que le respect est la base d’une vie de couple harmonieuse.
  • Aussi, s’agit-il de prévenir toute forme de violences qui pourraient intervenir au sein du couple.
  • Si, de longue date, la jurisprudence avait implicitement consacré ce devoir de respect en sanctionnant avec fermeté le comportement violent d’un époux envers l’autre, le législateur a souhaité le graver dans le marbre de la loi aux fins d’appréhender au-delà des violences physiques, d’autres comportements déviants incompatibles avec la vie de couple que sont, par exemple, le harcèlement moral, les injures, le mépris, les atteintes à l’honneur et à la dignité ou encore le délaissement de l’autre conjoint.
  • Ce devoir consiste à interdire aux époux d’entretenir des relations sexuelles avec des tiers.
  • Si, depuis l’adoption de la loi du 11 juillet 1975, l’adultère n’est plus pénalement sanctionné, il demeure constitutif d’une faute civile susceptible de fonder, s’il est renouvelé et atteint un certain degré de gravité, une demande en divorce.
  • Le devoir d’assistance implique pour chaque époux de veiller l’un sur l’autre.
  • Autrement dit, il leur appartient de se soutenir et de se prodiguer mutuellement tous les soins utiles que les circonstances exigent, telles que notamment la maladie ou un état de fragilité
  • Le devoir d’assistance se distingue du devoir de secours en ce qu’il présente un caractère personnel, contrairement au devoir de secours qui est de nature purement pécuniaire.
  • L’article 215, al. 1 er du Code civil prévoit que «  les époux s’obligent mutuellement à une communauté de vie . »
  • Si, sous l’empire du droit antérieur, ce devoir supposait que les époux partagent, a minima , une même résidence, cette exigence a été abandonnée par la loi du 11 juillet 1975.
  • L’article 108 du Code civil dispose désormais que «  le mari et la femme peuvent avoir un domicile distinct sans qu’il soit pour autant porté atteinte aux règles relatives à la communauté de la vie . »
  • L’existence d’une communauté de vie entre époux demeure, néanmoins, toujours exigée.
  • Concrètement, elle suppose la mise en commun de moyens matériels et l’entretien, entre eux, de relations affectives.
  • Plus que des relations affectives, la communauté de vie implique une communauté de lit, soit l’obligation pour chaque époux de se prêter à des relations sexuelles.
  • Ce devoir conjugal qui échoit à chaque époux demeure somme toute relatif, dans la mesure où il ne saurait, en aucune manière, justifier qu’un époux contraigne son conjoint à avoir des relations sexuelles.
  • Un tel agissement serait constitutif d’un viol, crime puni d’une peine de quinze ans de réclusion criminelle.

==> Second effet : la création de fonctions conjointes

Le mariage ne crée pas seulement des devoirs à l’égard des époux, il leur confère également des fonctions qu’ils exercent conjointement.

Ces fonctions conjointes sont énoncées aux articles 213 et 215 du Code civil :

  • L’article 213 du Code civil prévoit que «  Les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille. Ils pourvoient à l’éducation des enfants et préparent leur avenir . »
  • Issue de la loi du 4 juin 1970, cette disposition traduit la volonté du législateur d’instituer une égalité entre le mari et la femme, quant à la conduite de la famille.
  • Lors de l’adoption du Code civil, la femme mariée avait été placée sous l’autorité de son mari auquel elle devait obéissance.
  • La loi du 18 février 1938 a déchu le mari de cette prérogative. Celui-ci a néanmoins sa qualité de chef de famille, de sorte que la direction du ménage était assurée par lui seul.
  • Il faut attendre les lois du 4 juin 1970 et du 11 juillet 1975 pour que le mari et la femme soient placés sur un même pied d’égalité.
  • Désormais, tous deux disposent des mêmes prérogatives qu’ils exercent conjointement.
  • À cet égard, tandis que pour certains actes, leur accomplissement est subordonné à l’accord des deux époux (codécision) ou à autorisation (cogestion), d’autres pourront être régularisés séparément par chacun d’eux (gestion concurrente), un certain nombre de présomptions ayant été instituées par le législateur afin de faciliter le fonctionnement du ménage.
  • L’article 215, al. 2 e du Code civil prévoit que «  la résidence de la famille est au lieu qu’ils choisissent d’un commun accord . »
  • Le choix du logement familial ne peut ainsi procéder que d’une décision conjointe des époux.
  • Le mari ne dispose plus du pouvoir d’imposer unilatéralement à sa conjointe le lieu de résidence de la famille, comme tel était le cas sous l’empire du droit antérieur.
  • C’est la loi du 11 juillet 1975 qui a institué une égalité absolue entre le mari et la femme pour l’accomplissement de cet acte fondateur, sinon symbolique.
  • Le logement familial ne peut désormais plus qu’être choisi d’un commun accord entre les époux.
  • Faute d’accord, l’article 215, al. 2 e du Code civil le confère plus au mari une voix qui primerait sur celle de son épouse, c’est au juge qu’il reviendra de trancher le différend, encore qu’il ne s’agisse là que d’un cas d’école.
  • Lorsque les époux ne s’entendent pas sur leur lieu de résidence, il est fort probable qu’ils en tirent toutes les conséquences en mettant un terme à leur engagement matrimonial.

II) Les rapports pécuniaires entre les époux

S’agissant des rapports pécuniaires entre les époux, le mariage produit des effets qui tiennent, d’une part, à l’interdépendance des époux, d’autre part, à leur indépendance et enfin, aux situations de crise qu’ils sont susceptibles de traverser.

==> Les effets relatifs à l’interdépendance des époux

Parce que les époux sont assujettis à une communauté de vie, cette obligation implique qu’ils coopèrent pour l’accomplissement d’un certain nombre d’actes qui intéressent le fonctionnement matériel du ménage.

  • L’article 214 du Code civil prévoit que «  si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives.
  • Il s’agit de toutes les dépenses qui assurent le fonctionnement du ménage (contrairement aux dépenses d’investissement).
  • Ce sont donc toutes les dépenses d’intérêt commun que fait naître la vie du ménage
  • La JP tend également à reconnaître certaines dépenses d’agrément comme des charges du mariage
  • Exemples : nourriture, vêtements, loyer, gaz, eau, électricité, internet etc…
  • Les charges du mariage sont toutes celles relatives au train de vie du ménage.
  • Elles ne doivent pas être confondues avec les dépenses ménagères qui se limitent aux frais strictement nécessaires au fonctionnement du ménage.
  • Il y a donc un principe de proportionnalité qui a été institué par le législateur quant à la répartition des charges
  • Le poids de cette obligation qui pèse sur les époux est, en effet, fonction de leurs revenus respectifs.
  • Si l’un des époux perçoit un revenu de 1000 euros et que l’autre perçoit un revenu de 2000 alors le second devra contribuer deux fois plus que le premier aux charges du mariage.
  • Parce que le logement familial est l’endroit où est censée vivre et évoluer la cellule familiale, il bénéficie d’une protection spécifique, protection visant à lui octroyer un statut qui fait obstacle aux atteintes dont il pourrait faire l’objet.
  • Cette protection est instituée à l’article 215, al. 3 e du Code civil.
  • Cette disposition prévoit que «  les époux ne peuvent l’un sans l’autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni. Celui des deux qui n’a pas donné son consentement à l’acte peut en demander l’annulation : l’action en nullité lui est ouverte dans l’année à partir du jour où il a eu connaissance de l’acte, sans pouvoir jamais être intentée plus d’un an après que le régime matrimonial s’est dissous . »
  • Il ressort de cette disposition que tout acte de disposition portant sur le logement familial ou les biens mobiliers le garnissant est subordonné à l’accord des deux époux.
  • Autrement dit, les deux époux doivent consentir à l’accomplissement de l’acte de disposition qui peut consister, tout autant en l’aliénation du bien, qu’en la constitution d’une sûreté réelle.
  • En cas de dépassement de pouvoir par l’un des deux époux, la sanction encourue est la nullité de l’acte accompli sans le consentement de l’autre.

==> Les effets relatifs à l’indépendance des époux

  • L’article 220 du Code civil prévoit que «  chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants : toute dette ainsi contractée par l’un oblige l’autre solidairement.
  • Il ressort de cette disposition que chaque époux est investi du pouvoir d’accomplir seul les actes qui visent effectuer des dépenses pour le fonctionnement du ménage.
  • Ce pouvoir le confère, autrement dit, s’agissant des dépenses ménagères, du pouvoir de contracter seul avec les tiers.
  • À cet égard, le texte précise que la dette contractée par l’un des époux engage l’autre solidairement.
  • Cela signifie que le tiers contractant peut demander à n’importe quel époux de régler la totalité de la dette contractée seul par l’autre conjoint.
  • Le principe de solidarité des dettes ménagères n’est toutefois pas absolu : le législateur l’a assorti de plusieurs exceptions.
  • Tout d’abord , la solidarité n’a pas vocation à jouer pour les dépenses manifestement excessives, soit celles qui sont déraisonnables eu égard le train de vie du ménage ou l’utilité ou l’inutilité de l’opération.
  • Ensuite , la solidarité est écartée pour les achats à tempérament ainsi que pour les emprunts, à moins précise l’alinéa 3 de l’article 220 du Code civil qu’ils ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d’emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage.
  • L’article 222 du Code civil prévoit que «  si l’un des époux se présente seul pour faire un acte d’administration, de jouissance ou de disposition sur un bien meuble qu’il détient individuellement, il est réputé, à l’égard des tiers de bonne foi, avoir le pouvoir de faire seul cet acte. »
  • Cette disposition institue ainsi une présomption irréfragable de pouvoir au bénéfice de chaque époux s’agissant des actes (administration, disposition et jouissance) portant sur un bien meuble, à l’exception de ceux garnissant le logement familial et ceux strictement attachés à la personne de son détenteur, tels que les outils de travail ou encore le linge à usage personnel.
  • Il s’agit ici de protéger les tiers de bonne foi, en ce sens qu’ils sont dispensés de vérifier les pouvoirs de l’époux avec lequel ils contractent.
  • Si, autrement dit, un époux accomplit un acte en dépassement de son pouvoir, cet acte demeurera valable et ne pourra donc pas être remis en cause par le conjoint lésé.
  • Ce dernier pourra, tout au plus, engager la responsabilité de son conjoint qui a agi au préjudice de ses droits
  • L’article 223 du Code civil prévoit que «  chaque époux peut librement exercer une profession, percevoir ses gains et salaires et en disposer après s’être acquitté des charges du mariage . »
  • En application de cette disposition les époux jouissent ainsi d’une autonomie professionnelle.
  • D’une part , d’exercer la profession de leur choix
  • D’autre part , de percevoir leurs gains et salaires, soit l’ensemble des revenus issus de leur activité professionnelle
  • Enfin , de disposer librement de leurs gains et salaires
  • La liberté professionnelle dont jouit chaque époux est limitée par la seule obligation de contribution aux charges du mariage.
  • En dehors de cette obligation, l’autonomie que leur confère la loi vise à faire obstacle à toute immixtion du conjoint dans l’exercice et la gestion de l’activité professionnelle de l’autre.
  • L’article 221 du Code civil prévoit que «  chacun des époux peut se faire ouvrir, sans le consentement de l’autre, tout compte de dépôt et tout compte de titres en son nom personnel . »
  • Ainsi, les époux sont-ils libres d’ouvrir, à titre individuel, un compte bancaire, sans que le consentement de l’autre ne soit requis.
  • Afin de renforcer ce droit à l’ouverture d’un compte bancaire, l’alinéa 2 du texte précise que «  à l’égard du dépositaire, le déposant est toujours réputé, même après la dissolution du mariage, avoir la libre disposition des fonds et des titres en dépôt . »
  • Cela signifie que, non seulement, les époux sont autorisés à se faire ouvrir, en toute autonomie, un compte bancaire, mais encore qu’ils jouissent de la faculté de leur faire fonctionner.
  • Il est ainsi fait interdiction au banquier d’exiger le consentement du conjoint pour exécuter l’ordre qui lui a été adressé par le titulaire du compte.
  • Ce dernier est réputé être investi du pouvoir d’accomplir toute opération sur son compte personnel
  • La présomption de pouvoir posée par le texte est ici irréfragable, de sorte que, en cas de dépassement de pouvoir par le titulaire du compte tel que l’encaissement de fonds qui ne lui appartiennent pas, le banquier n’engage pas sa responsabilité.
  • L’article 225 du Code civil prévoit que «  chacun des époux administre, oblige et aliène seul ses biens personnels . »
  • Cette disposition confère ainsi à chaque époux, non seulement la gestion exclusive de ses biens propres, mais encore le pouvoir de les engager
  • Il en résulte que la clause dite « d’unité d’administration » par laquelle un époux se verrait investi du pouvoir de gérer les biens de son conjoint est prohibée.
  • Tout au plus, en application de l’article 218 du Code civil «  un époux peut donner mandat à l’autre de le représenter dans l’exercice des pouvoirs que le régime matrimonial lui attribue . »
  • Seule exception à la règle posée à l’article 225 du Code civil, lorsque le logement familial appartient en propre à un époux, c’est le principe de la cogestion qui s’applique, soit l’exigence pour le propriétaire du bien affecté à l’usage de la famille de recueillir le consentement de son conjoint pour accomplir un acte de disposition.

==> Les effets relatifs aux situations de crise

Le couple est susceptible de rencontrer des difficultés qui peuvent aller du simple désaccord à l’impossibilité pour un époux d’exprimer sa volonté.

Afin de permettre au couple de surmonter ces difficultés, le législateur a mis en place plusieurs dispositifs de règles énoncés aux articles 217 , 219 et 220-1 du Code civil.

Parmi ces dispositifs qui visent à régler les situations de crise traversées par le couple on compte, l’autorisation judiciaire, la représentation judiciaire et la sauvegarde judiciaire.

  • L’article 217, al. 1 er du Code civil prévoit que «  un époux peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire, si celui-ci est hors d’état de manifester sa volonté ou si son refus n’est pas justifié par l’intérêt de la famille . »
  • La règle ainsi posée vise à permettre à un époux d’accomplir seul un acte qui, en situation normale, relève de la cogestion, soit dont l’accomplissement est subordonné à l’accord des deux époux.
  • Afin de surmonter la crise traversée par le couple, le juge peut autoriser l’accomplissement de cet acte par un seul époux.
  • Soit l’un des époux est dans l’impossibilité d’exprimer sa volonté
  • Soit l’un des époux refuser d’accomplir l’acte, alors même que ce refus n’est pas justifié par l’intérêt de la famille
  • L’alinéa 2 de l’article 217 du Code civil précise que «  l’acte passé dans les conditions fixées par l’autorisation de justice est opposable à l’époux dont le concours ou le consentement a fait défaut, sans qu’il en résulte à sa charge aucune obligation personnelle . »
  • Autrement dit, si l’autorisation du juge rend valable l’acte accompli par un seul époux alors que relevant de la cogestion, le conjoint qui n’a pas donné son consentement n’est pas engagé par cet acte.
  • L’acte lui demeure toutefois opposable, ce qui signifie qu’il ne pourra pas le remettre en cause.
  • L’article 219 du Code civil prévoit que «  si l’un des époux se trouve hors d’état de manifester sa volonté, l’autre peut se faire habiliter par justice à le représenter, d’une manière générale, ou pour certains actes particuliers, dans l’exercice des pouvoirs résultant du régime matrimonial, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge . »
  • Il s’agit ici de permettre à un époux de représenter son conjoint qui se retrouve dans l’incapacité d’exprimer sa volonté.
  • À la différence de l’autorisation judiciaire qui n’engage pas l’époux qui n’a pas consenti à l’acte, la représentation judiciaire autorise un époux à agir au nom et pour le compte de son conjoint.
  • L’acte accomplit engage donc personnellement ce denier qui est réputé avoir accompli l’acte.
  • Ce mécanisme n’est autre qu’une application des règles mandat, à la différence que sa mise en place procède, non pas d’un échange des consentements entre le mandant et le mandataire, mais d’une décision du juge.
  • À cet égard, la représentation judiciaire est subordonnée à l’établissement de l’empêchement du conjoint représenté.
  • Cet empêchement peut résulter, tout aussi bien, d’un état de santé qui affecte l’expression de la volonté du conjoint représenté que de son éloignement géographique.
  • Quant à l’étendue du pouvoir de l’époux qui est investi du pouvoir de représentation, il dépend du régime matrimonial applicable.
  • Cela signifie que pourront être accomplis tout autant des actes qui relèvent de la cogestion que ceux qui relèvent de la gestion exclusive.
  • Par ailleurs, il est indifférent que l’acte accompli soit un acte d’administration ou de disposition. Le texte vise les actes de toute nature.
  • L’article 220-1 du Code civil prévoit que «  si l’un des époux manque gravement à ses devoirs et met ainsi en péril les intérêts de la famille, le juge aux affaires familiales peut prescrire toutes les mesures urgentes que requièrent ces intérêts . »
  • Il ressort de cette disposition que, en cas de manquement grave d’un époux à ses obligations et devoirs son conjoint peut saisir le juge aux fins de restreindre ses pouvoirs.
  • Par grave, il faut entendre un manquement qui met en péril les intérêts de la famille.
  • Lorsque cette condition est remplie, le juge pourra prononcer toute mesure urgente visant à empêcher à ce qu’il soit porté atteinte à l’intérêt de la famille.
  • L’alinéa 2 du texte précise qu’il peut s’agir d’interdire à un époux de faire, sans le consentement de l’autre, des actes de disposition sur ses propres biens ou sur ceux de la communauté, meubles ou immeubles.
  • Il peut aussi interdire le déplacement des meubles et plus généralement de tout acte d’administration et de disposition.
  • La liste n’étant pas exhaustive, il peut encore être demandé par un époux la nomination d’un administrateur qui aura pour mission de régler la situation de crise, à tout le moins d’accomplir tous les actes utiles visant à permettre le fonctionnement du ménage.
  • En tout état de cause, les mesures de sauvegarde prononcées par le juge ont nécessairement un caractère temporaire puisqu’elles sont limitées à trois.
  • Si la difficulté persiste au-delà de ce délai, il appartiendra au couple d’en tirer toutes les conséquences en engageant, par exemple, une procédure de divorce ou de séparation de corps.

[1] F. Terré, op. préc ., n°325, p. 299.

[2] Ph. Malaurie et H. Fulchiron, op. préc., n°106, p. 53 .

[3] En vertu de l’article 1088 du Code civil «  toute donation faite en faveur du mariage sera caduque si le mariage ne s’ensuit pas  ».

[4] L’article 515-8 du Code civil dispose que «  le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple  ».

[5] Si, le législateur a inséré une définition du concubinage dans le Code civil c’est surtout pour mettre fin à la position de la Cour de cassation qui, de façon constante, refusait de qualifier l’union de deux personnes de même sexe de concubinage (Cass. soc., 11 juill. 1989, deux arrêts : Gaz. Pal. 1990, 1, p. 217, concl. Dorwling-Carter ; JCP G 1990, II, 21553, note Meunier ; Cass. Civ. 3 e , 17 décembre 1997 : D. 1998, jurispr. p. 111, concl. J.-F. Weber et note J.-L. Aubert ; JCP G 1998, II, 10093, note A. Djigo).

[6] Cass. 1re civ., 19 mars 1991 : Defrénois 1991, p. 942, obs. J. Massip ; Cass. 1re civ., 17 oct. 2000 : Dr. famille 2000, comm. 139, note B. Beignier.

[7] En matière fiscale, pour ce qui concerne l’assiette de l’ISF, les concubins sont assimilés à des époux. Il en va de même en matière de protection sociale où le concubin est considéré comme un ayant du droit de celui qui bénéficie de l’affiliation à la sécurité sociale.

[8] P. Simler et P. Hilt, « Le nouveau visage du Pacs : un quasi -mariage », JCP G , 2006, 1, p. 161.

[9] Article 515-1.

Aurélien Bamdé

Aurélien Bamdé

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Exemple de dissertation juridique rédigée

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

Exemple de dissertation juridique

Connaître la méthodologie de la dissertation juridique , c’est bien. Mais avoir un exemple de dissertation juridique entièrement rédigée, c’est encore mieux !

C’est tout l’intérêt de cet article. Vous trouverez ci-dessous un exemple de dissertation juridique pour le sujet suivant : « Chacun a droit au respect de sa vie privée ».

Le but est de vous aider à comprendre à quoi doit ressembler une dissertation juridique et comment il faut rédiger sa dissertation.

Vous remarquerez également, à travers l’exemple de dissertation ci-dessous, que la dissertation est bien un exercice de démonstration (et pas un simple recopiage du cours).

Sans plus attendre, c’est parti pour la dissertation !

A l’ère de la presse people , d’Internet et des réseaux sociaux, le droit au respect de la vie privée est régulièrement mis à mal. Pourtant, depuis la loi du 17 juillet 1970 tendant à renforcer la garantie des droits individuels des citoyens, l’article 9 du Code civil énonce en son premier alinéa que « chacun a droit au respect de sa vie privée » .

En réalité, la consécration en droit français du droit au respect de la vie privée a été relativement tardive. Avant la loi du 17 juillet 1970, aucune disposition législative ne protégeait explicitement le droit au respect de la vie privée. En matière d’atteintes à la vie privée, les juges se servaient de l’ancien article 1382 du Code civil (aujourd’hui article 1240 du Code civil), qui nécessitait de prouver une faute, un dommage et le lien de causalité entre les deux. L’ancien article 1382 s’est toutefois révélé insuffisant pour sanctionner efficacement les atteintes à la vie privée. En particulier, les atteintes les plus graves ne pouvaient être sanctionnées pénalement (les juges ne pouvant pas créer d’infractions). Sous l’impulsion de la doctrine, le législateur est alors intervenu et la loi du 17 juillet 1970 a consacré le droit au respect de la vie privée à l’article 9 du Code civil.

Il n’est donc plus nécessaire, comme c’était le cas avant la loi du 17 juillet 1970, de prouver une faute pour que soit sanctionnée l’atteinte à la vie privée. En vertu de l’article 9 du Code civil, chaque individu a le droit au respect de sa vie privée. Le droit au respect de la vie privée est un véritable droit de la personnalité, dont toute personne physique est titulaire. Dès lors, la simple violation de la vie privée d’une personne est sanctionnable. Cette violation est caractérisée par une immixtion dans la vie privée d’une personne sans autorisation préalable.

Aujourd’hui, le droit au respect de la vie privée constitue un principe fondamental en droit français. Outre l’article 9 du Code civil, il est protégé par d’autres textes. A titre d’exemple, l’article 226-1 du Code pénal sanctionne le fait de porter volontairement atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui en captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel, ou en fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé. Par ailleurs, le domaine de la vie privée ne cesse d’être étendu par la jurisprudence, qui, ce faisant, donne une importance croissante au droit au respect de la vie privée. Enfin, le droit au respect de la vie privée est également consacré en droit international.

On peut toutefois remarquer que le droit au respect de la vie privée peut entrer en conflit avec d’autres droits et libertés, comme la liberté d’expression, la liberté de la presse et le droit à l’information du public. Dans ce genre de situations, les juges devront rechercher un équilibre, et « privilégier la solution la plus protectrice de l’intérêt le plus légitime » (Cass. Civ. 1ère, 9 juillet 2003). Dès lors, le droit au respect de la vie privée pourra être relégué au second plan si le droit avec lequel il entre en opposition mérite davantage d’être protégé.

La question se pose donc de savoir si le droit au respect de la vie privée est absolu ou s’il comporte des limites.

En réalité, si le droit au respect de la vie privée a été consacré comme un principe général (I), il n’en demeure pas moins qu’il est assorti d’un certain nombre de limites (II).

I) Le principe général du droit au respect de la vie privée

Le droit au respect de la vie privée est consacré aussi bien en droit interne qu’en droit communautaire et international, et protège tous les individus (A). En outre, le domaine d’application du droit au respect de la vie privée est large et est régulièrement étendu par la jurisprudence (B).

A) La consécration générale du droit au respect de la vie privée

Ainsi que nous l’avons mentionné plus haut, l’article 9 du Code civil dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée » .

Ce principe a valeur constitutionnelle. En effet, si le droit au respect de la vie privée est absent de la Constitution de 1958 et du préambule de la Constitution de 1946, il a progressivement été consacré par la jurisprudence du Conseil Constitutionnel. Ainsi, dans une décision n° 94-352 DC du 18 janvier 1995, le Conseil Constitutionnel affirmait déjà que «  la méconnaissance du droit au respect de la vie privée peut être de nature à porter atteinte à la liberté individuelle ».  Plus tard, dans une décision n° 99-416 DC du 23 juillet 1999, le Conseil Constitutionnel rattachera le droit au respect de la vie privée à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui inclut la liberté au sein des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Aujourd’hui, le Conseil Constitutionnel n’hésite pas à préciser que la liberté proclamée par cet article « implique le respect de la vie privée » (Cons. const., 30 mars 2012, n° 2012-227 QPC) ou que le droit au respect de la vie privée est protégé par l’article 2 de la Déclaration de 1789 (Cons. const., 25 mars 2014, n° 2014-693).

Le droit au respect de la vie privée a également été consacré par la jurisprudence. On peut citer le célèbre arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 23 octobre 1990, selon lequel «  toute personne, quels que soient son rang, sa naissance, sa fortune, ses fonctions présentes ou à venir, a droit au respect de sa vie privée ».

Enfin, le droit au respect de la vie privée fait l’objet d’une consécration en droit communautaire et international. Il figure à l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ( « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications » ). On le retrouve également à l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme selon lequel « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance » , ou encore à l’article 12 de la Déclaration universelle des droits de l’homme ( « Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes. ») .

A travers l’ensemble de ces formulations, on remarque que le droit au respect de la vie privée s’applique à « chacun » , à « toute personne » . Il est consacré comme un droit qui protège tous les individus.

Non seulement le droit au respect de la vie privée a été consacré comme un droit à portée générale, mais son domaine d’application ne cesse de s’étendre.

B) L’extension continue du domaine de la vie privée

La loi ne donne pas de définition de la notion de vie privée. Dès lors, le domaine de la vie privée a été précisé par la jurisprudence, qui en a progressivement étendu les contours.

Aujourd’hui, la vie privée englobe le domicile (Cass. Civ. 2 ème , 5 juin 2003 : la publication dans la presse de la photographie de la résidence d’une personne, avec le nom du propriétaire et sa localisation, constitue une atteinte à la vie privée de cette personne), la religion (Cass. Civ. 1 ère , 6 mars 2001), la sexualité, l’orientation sexuelle (CEDH, 25 mars 1992, Botella c/ France : le refus de retranscrire un changement de sexe à l’état civil est une atteinte à la vie privée), la vie sentimentale, étant entendu que cette notion englobe toutes les relations affectives (Cass. Civ. 1 ère , 6 oct. 1998 : la diffusion d’une lettre confidentielle dont l’objet était de révéler une situation de concubinage représente une atteinte au droit au respect de la vie privée), ou encore l’état de santé (CA Paris, ord. réf., 13 mars 1996 : la révélation par un médecin d’éléments couverts par le secret médical constitue une atteinte à la vie privée du patient).

On peut également citer les correspondances. A ce titre, l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et l’article 12 de la Déclaration universelle des droits de l’homme sont clairs puisqu’ils mentionnent explicitement que toute personne a droit au secret de ses correspondances. Ce principe a été renforcé par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui sanctionne sur le fondement de l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme la violation des correspondances (CEDH, 2 août 1984, Malone c/ Royaume-Uni). En outre, le secret des correspondances s’applique, en plus des communications écrites et téléphoniques, aux communications électroniques (TGI Paris, 2 nov. 2000 : « l’envoi de messages électroniques de personne à personne constitue de la correspondance privée » ).

On pourrait encore citer la protection des données personnelles, qui a été renforcée par l’entrée en vigueur, le 25 mai 2018, du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD).

Il est donc clair que le domaine de la vie privée, et donc le champ d’application du droit au respect de la vie privée, est vaste.

La portée du droit au respect de la vie privée est donc particulièrement générale. Le droit au respect de la vie privée concerne tous les individus et a vocation à s’appliquer dans de nombreuses situations (I). Toutefois, le droit au respect de la vie privée n’est pas un droit absolu. Son application se verra parfois contrecarrée par un certain nombre de limites (II).

II) Les limites du droit au respect de la vie privée

Le droit au respect de la vie privée ne prime pas toujours sur les autres droits et libertés avec lesquels il entre en conflit. Dans ce genre de cas, son application pourra se voir limitée (A). Par ailleurs, le droit au respect de la vie privée est également limité par le régime de preuve et les sanctions des atteintes à la vie privée (B).

A) Les autres droits et libertés opposés au droit au respect de la vie privée

Le droit au respect de la vie privée peut se voir limité par différents droits et libertés.

En premier lieu, le droit au respect de la vie privée doit se concilier avec la liberté d’expression, la liberté de la presse et le droit à l’information du public. En principe, le premier prime sur les autres ; le droit à l’information ne justifie pas la publication d’éléments relevant de la vie privée. Mais cette primauté cède dans le cas des personnes publiques quand elles sont en public dans l’exercice de leur activité (un sportif pendant un évènement sportif, un acteur pendant une soirée de remise des prix…). Ainsi, l’application du droit au respect de la vie privée est écartée si la publication, bien que révélatrice d’une relation sentimentale, porte sur un événement public (Cass. Civ. 1 ère , 1 er  mars 2017). De même, la publication d’informations relatives à l’existence d’un enfant naturel du Prince Albert de Monaco ne constitue pas une atteinte à la vie privée de ce dernier en raison du caractère héréditaire de ses fonctions de chef d’État (CEDH, 10 nov. 2015, Couderc et Hachette Filipacchi Associés c/ France, n o 40454/07).

En second lieu, le droit au respect de la vie privée peut parfois être limité dans le cadre de la sphère professionnelle. Ainsi, l’employeur a le droit de s’immiscer dans la vie privée de ses employés à certains égards. Il pourra par exemple imposer à ses employés une tenue vestimentaire (Cass. soc., 28 mai 2003). De même, les dossiers et fichiers créés par un salarié à l’aide de son ordinateur de travail sont présumés, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels, avoir un caractère professionnel. Ainsi, l’employeur peut y avoir accès sans demander l’autorisation (Cass. soc., 19 juin 2013, n° 12-12139).

En troisième lieu, le droit au respect de la vie privée peut entrer en opposition avec le droit à la preuve. La question qui se pose est la suivante : peut-on accepter qu’une partie à un procès produise des preuves qui portent atteinte à la vie privée de son adversaire ? La Cour de cassation a répondu à cette question par l’affirmative : la production de preuves constituant une atteinte à la vie privée est justifiée si elle est indispensable à l’exercice du droit à la preuve et que l’atteinte est proportionnée au but poursuivi (Cass. Civ. 1ère, 25 févr. 2016, n° 15-12.403).

Ainsi, l’application du droit au respect de la vie privée se voit limitée par les autres droits et libertés avec lesquels il entre en conflit. C’est également le cas en raison du régime de preuve et de la relative efficacité des sanctions des atteintes à la vie privée.

B) Le régime de preuve et les sanctions des atteintes à la vie privée

L’article 9 alinéa 2 du Code civil prévoit que « les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée : ces mesures peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé » .

Toutefois, pour que ces sanctions soient prononcées, il faut que l’atteinte à la vie privée soit prouvée. A ce titre, il ne suffit pas de démontrer une immixtion dans la vie privée. Il faut également vérifier l’absence d’autorisation préalable de ladite immixtion. En effet, chaque personne peut librement autoriser des atteintes à sa vie privée. Dès lors, en présence d’une autorisation expresse, l’atteinte à la vie privée ne pourra pas être caractérisée.

Par ailleurs, comme l’énonce clairement l’article 9 alinéa 2 du Code civil, une atteinte à la vie privée peut donner lieu, sur le plan civil, à deux types de sanctions. D’abord, la victime peut prétendre à la réparation du préjudice subi, c’est-à-dire à l’allocation de dommages-intérêts. Si, comme on l’a évoqué précédemment, la constatation de l’atteinte à la vie privée est suffisante pour engager la responsabilité de son auteur (sans qu’il soit nécessaire de caractériser la faute), il n’en demeure pas moins qu’il faut bien établir un préjudice pour que la victime puisse obtenir réparation. A ce titre, la détermination du préjudice est souvent difficile et ne compense pas toujours l’ampleur de l’atteinte. En particulier, les profits générés par la révélation d’informations privées sont souvent bien supérieurs aux dommages-intérêts décidés par les juges (on pense notamment aux magazines people qui sont vendus à des centaines de milliers d’exemplaires). Ensuite, la victime peut également prétendre à un certain nombre de mesures qui ont pour but de faire cesser l’atteinte à la vie privée (comme un séquestre ou une saisie).

Ces sanctions ne peuvent toutefois intervenir que de manière exceptionnelle, en cas d’atteinte particulièrement grave à la vie privée. Ainsi, dans de nombreux cas d’atteintes à la vie privée, elles ne seront pas prononcées par les juges.

On voit donc que les sanctions civiles de l’atteinte à la vie privée ne sont pas réellement dissuasives. C’est également le cas en ce qui concerne les sanctions pénales. L’article 226-1 du Code pénal dispose qu’ « est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait, au moyen d’un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui :  1° En captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ;  2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé. Lorsque les actes mentionnés au présent article ont été accomplis au vu et au su des intéressés sans qu’ils s’y soient opposés, alors qu’ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-ci est présumé. » Pour qu’il y ait sanction, il faut donc qu’il y ait une atteinte volontaire à la vie privée réalisée selon certains procédés bien précis (captation ou enregistrement sans le consentement de la personne, en sachant que le consentement est présumé quand l’atteinte est réalisée devant la personne et que celle-ci ne montre pas une opposition).

Ainsi, aussi bien les sanctions civiles que pénales n’interviennent que de manière exceptionnelle, et contribuent à limiter l’efficacité du droit au respect de la vie privée.

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Fiches de révision  >  Droit privé  > Le contrat de mariage

Droit des régimes matrimoniaux

Le contrat de mariage

  • VUE GÉNÉRALE

L'ESSENTIEL

Exercices corrigés, bibliographie.

Dans le style de Portalis, l’article 1387 du Code civil proclame la liberté du contenu du contrat de mariage. Une liberté aussitôt limitée par l’article 1388 qui renvoie la lumière prescriptive des effets directs du mariage (art. 212 à 226 C. civ.) ; au droit commun impératif des régimes matrimoniaux, s’ajoutent, parmi tant de bornes à la liberté de la détermination du contenu du régime matrimonial, toutes les règles impératives du droit de la famille (divorce, succession, libéralités, filiation, autorité parentale).

Premier exercice

Commentaire d’arrêt

Commenter l’arrêt Jacobet de Nombel, Civ. 1 re , 14 janv. 1997.

Second exercice

Dissertation

L’intérêt de la famille en droit des régimes matrimoniaux.

Ouvrages à consulter dans Dallozbibliothèque

M. Grimaldi et al., Droit patrimonial de la famille , 3 e  éd., Dalloz, coll. « Dalloz Action », 2008, n° 120.00 s.

N. Peterka, Régimes matrimoniaux, 1 re éd., Dalloz, coll. « HyperCours », 2008, n° 605 s. (le contrat de mariage).

J. Revel, Les régimes matrimoniaux, 5 e éd., Dalloz, coll. « Cours », 2010, n° 88 s.

Fr. Terré et Ph. Simler, Droit civil : Les régimes matrimoniaux, 5 e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2008, n° 148 s. (la détermination du régime matrimonial).

Législation

■  La liberté de choix du régime matrimonial : article 1387 du Code civil

(Loi n° 65-570 du 13 juillet 1965) « La loi ne régit l’association conjugale, quant aux biens, qu’à défaut de conventions spéciales, que les époux peuvent faire comme ils le jugent à propos, pourvu qu’elles ne soient pas contraires aux bonnes mœurs ni aux dispositions qui suivent. »

Jurisprudence

La validité du contrat de mariage est soumise au droit commun des contrats, exigeant un consentement non vicié

Civ. 1 re , 24 nov. 1993 ,  Bull. civ. I, n° 342  ; D. 1994. Jur. 342, rapport. J. Thierry  ; Defrénois 1994, art. 35856, p. 896, obs G. Champenois ; D.  1995. Somm. 325, obs. F. Lucet  ; RTD civ. 1995. 673, obs. B. Vareille .

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  • Le logement de la famille
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  • Les charges du mariage
  • Les régimes conventionnels
  • Les remèdes aux crises matrimoniales
  • L’indépendance des époux

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Les conditions de forme et la preuve du mariage

septembre 22, 2019 Isa Germain 7) Fiches de droit de la famille 0

Les conditions de forme du mariage

Le mariage est un acte juridique par lequel un homme et une femme établissent entre eux une union dont la loi civile règle impérativement les conditions, les effets, et la dissolution. C’est un acte juridique formaliste, il ne se forme pas par le seul échange des consentements. Il faut respecter un certain formaliste. Ce formalisme se décompose en 2 temps : d’abord les formalités antérieurs à la célébration, puis le rite la célébration.

Section 1 : les formalités antérieures à la célébration

A) la publication du projet de mariage

  • Cours de droit de la famille
  • L’obligation des parents d’entretenir, nourrir, élever les enfants
  • L’adoption simple : définition, conditions, effets
  • L’adoption plénière : définition, conditions, effets
  • La Procréation Médicale Assistée (PMA)
  • La preuve contentieuse de la filiation et action en justice
  • Les modes de preuves non contentieux de la filiation
  • Tout sur le PACS : conclusion, effets, fin du Pacs
  • L’union libre ou concubinage : constitution, effet, rupture
  • Les conséquences de la mort de l’époux sur le mariage

Prévu par les article 63 et suivant. Elle consiste a faire connaître au public le projet de mariage grâce à l’apposition d’une affiche en marie (publication des bancs).

Le but est double. 1. permettre au tiers de signaler tel ou tel empêchement au mariage ce qu’ils font au moyen d’une opposition. 2. imposer un délai d’attente au époux pour éviter les mariages irréfléchies. La publication a lieu à la mairie dans laquelle le mariage doit être célébré et à la marie du domicile ou de la résidence de chacun des mariages (normalement à la porte). Elle doit avoir lieu au plus tard 10 jours avant le mariage et au plus tôt un an avant. Elle n’est possible qu’après remise du certificat prénuptial et audition des futurs époux (si nécessaire).

Enfin, le procureur de la République peut accorder des dispenses de publication de deux sortes qui correspondent au deux buts de la formalité. 1. une simple dispense d’affichage, dans ce cas le délai de 10 jours demeures, il y a une sorte de publication non public. C’est le plus souvent le cas du vieux couple que tous les mondes croyaient marié, donc on veut éviter les rumeurs etc… 2. dispense de publication, alors cette dispense permet un mariage immédiat. Elle intervient dans 2 situations : dans le cas du mariage inextremiste (l’un des époux va mourir) et dans le cas de la naissance imminente.

B) la production de certaine pièces

  • Expédition d’un acte de naissance délivré depuis moins de 3 mois. 2. certificat du notaire si un contrat a été passé 3. au cas de remariage, les pièces établissant la dissolution du premier mariage 4. le cas échéant, les dispenses d’age ou de parenté 5. le certificat prénuptial

Section 2 : le rite de la célébration du mariage

le lieu du mariage

Article 74 : le mariage peut être célébrer dans la commune où l’un des époux à son domicile ou sa résidence depuis plus d’un mois. Dans la commune choisit le mariage est célébré dans la marie devant un officier d’état civil, mais il peut l’être au domicile de l’un des époux dans les cas grave (mariage in extrémiste) la date du mariage article 75 : le jour est choisit par les futurs époux, l’heure par l’officier d’état civil en fonction des nécessités du service. La publicité de la célébration La célébration doit être public par conséquent les portes de la mairie ou de la maison doivent rester ouverte. la comparution des époux est nécessaire Article 146-1. cette condition a été posé expressément par la loi du 24 août 1993. Le texte précise que la comparution est nécessaire même si le français c’est marié à l’étranger. La Cour de cassation a jugé qu’il s’agissait là d’une condition de fond du mariage, jurisprudence discutable mais opportune. En droit international privé la forme d’un acte est régi par la loi du lieu dans lequel il est passé, alors que les règles de fond sont régis par les lois personnels des époux. Il s’agissait d’éviter qu’une française ne se marie dans des pays dans lesquels ont procède à des mariages forcés.

 Deux exceptions :

. mariage des militaires et marins en temps de guerre

. mariage posthume, ce mariage est possible depuis une loi du 31 décembre 1969 (article 171), il faut un motif grave (naissance d’un enfant le plus souvent) + la volonté matrimonial du défunt doit être établi par l’accomplissement des formalités essentiels qui précède le mariage + autorisation du président de la république. Il ne faut pas le confondre avec le mariage in extrémise qui produit tous les effets du mariage (naissance d’un régime patrimonial et vocation successoral) sauf quelques exceptions. En revanche le mariage posthume ne fait naître aucun régime matrimonial et n’attribue aucune vocation successoral. L’intérêt du mariage posthume est principalement de faciliter l’établissement de la filiation paternel de l’enfant à naître. Il y a environ 50 mariage posthume par an. la présence des témoins et des personnes dont l’autorisation est requise si elle n’a pas été donné par écris. Article 75. il faut au minimum 2 témoins et 4 maximums. le déroulement de la cérémonie

Le rite est organisé par l’article 75. lecture au époux des article 212, 213, 214 alinéa 1, 215 alinéa 1, 371-1. l’officier demande au époux si ils ont fait un contrat de mariage et si oui il le mentionne sur l’acte l’officier (si nécessaire)interroge les personnes dont l’autorisation est requise l’officier demande au époux si ils veulent se prendre pour mari et femme sur leur réponse affirmative il les déclare au nom de la loi unie par le mariage. Cet acte pose la question de savoir a quel moment précis le mariage est formé. Est-ce le moment de l’échange des consentements ou seulement le moment de la déclaration formelle de l’officier d’état civil. L’intérêt pratique de la question est quasi nulle. Mais l’intérêt théorique est considérable, c’est la part des intérêts privés dans le mariage. Est-ce que les gens se marient ou est-ce l’état qui les marie ? Dans la religion catholique, l’église n’est que témoin du mariage. l’acte de mariage est dressé sur le champ, signé par l’officier d’état civil, les époux, les témoins et le cas échéant les personnes dont l’autorisation été requise. Cet acte de mariage sera par la suite complété par des mentions en marge (décès, divorce, séparation de corps).

Section 3 : la preuve du mariage

Elle est très importante pour 3 catégories de personne. D’abord pour les époux, mais également pour les enfants car l’établissement de leur filiation obéit a des règles différentes si leur parents sont mariés ou non, et enfin pour les tiers. Il existe deux modes de preuve du mariage.

Premièrement, on peut prouver par un écrit dresser lors de la célébration du mariage, c’est l’acte du mariage qui est une variété d’acte d’état civil. Il s’agit alors d’une preuve préconstitué, elle a l’avantage d’être très convaincante mais l’inconvénient d’être bureaucratique.

Deuxième mode de preuve, c’est la preuve par possession d’état. Posséder un état est en avoir l’apparence. Un homme et une femme ont la possession d’état d’époux si la femme use du nom du mari, si il se traite réciproquement comme mari et femme et si ils ont la réputation a l’égard des tiers d’être mari et femme. C’est pourquoi on dit traditionnellement que la possession d’état suppose la réunion de trois éléments : nomus, tractatus, fama. Elle se fait par un faisceau d’indice, on établit une apparence dont on déduit une réalité incertaine. C’est une preuve anti-bureaucratique, vivante, spontané. Boire, manger, coucher ensemble c’est mariage il me semble. Mais c’est une preuve dangereuse car peu convaincante.

le principe

En principe l’acte de mariage est la seule mode recevable pour les enfants et les époux (194). Donc la preuve par la possession d’état est interdite (195).

les exceptions

la preuve par tout moyen

Elle est possible lorsque les registres d’états civils n’ont pas été tenu ou ont été détruit (règle de l’article 46 pour tous les actes d’états civils). Elle est également possible dans le cadre d’une procédure pénale qui est conduite contre l’auteur d’une destruction ou d’une falsification de l’acte de mariage (198 à 200). Enfin, selon certains auteurs la preuve serait libre pour les tiers. En pratique ce débat n’a aucun intérêt. preuve du mariage par la possession d’État Cas prévu par l’article 197, c’est celui dans lequel un enfant chercher a établir sa filiation alors que ces prétendu parent sont décédés. Si cet enfant à la possession d’état d’enfant commun des deux personnes dont il prétend descendre, il peut établir le mariage de ses parents par la possession d’état d’époux. Il faut donc deux possessions d’état. Il s’agit de secourir les enfants qui ne savent pas où leur parent se sont mariés. Mais cette règle peut aussi avoir pour effet de faire passer après coup des concubinages pour des mariages. C’est d’ailleurs historiquement comme cela qu’elle est né, elle trouve son origine dans une jurisprudence du parlement d’Aix en Provence devant laquelle Portalis avait plaidé pour sauver des enfants de parent protestant marié illégalement. Ils pouvaient ainsi être traité comme des enfants légitime. L’article 196 est une autre situation. Les enfants ont un acte de mariage, mais il est irrégulié, cet acte de mariage ne prouvant pas à lui seul le mariage, mais il le prouve malgré son irrégularité si il est conforté par la possession d’état d’époux. La possession d’état sert de complément de preuve.

Le Cours de droit de la famille est divisé en plusieurs fiches :

  • · Cours de droit de la famille – L’évolution de la famille et du droit de la famille – Définition de la famille
  • · Les conditions d’ordre physiologique du mariage – Le consentement des époux au mariage et l’autorisation des familles  – Les Empêchements à Mariage (bigamie, inceste, nubilité…)
  • · L’obligation des parents d’entretenir, nourrir et élever les enfants  – Les effets personnels du mariage  – Le régime primaire du mariage  – Les différents régimes matrimoniaux
  • · L’histoire du droit du divorce  – Le divorce par consentement mutuel  – Le divorce accepté  – Le divorce pour altération définitive du lien conjugal  – Le divorce pour faute  – La procédure de divorce  – Toutes les conséquences du divorce
  • · Conséquences de la mort d’un époux sur le mariage
  • · L’Union libre : constitution, effet, rupture – Tout sur le PACS : conclusion, effets, fin du Pacs
  • · Les modes de preuves non contentieux de la filiation  – La preuve contentieuse de la filiation
  • · L’adoption plénière : définition, conditions, effets – L’adoption simple : définition, conditions, effets  – La Procréation Médicale Assistée (PMA)
  • · La sanction des conditions de formation du mariage  – Les conditions de forme du mariage
  • · L’action à fin de subsides  – L’autorité parentale

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Migrations société 2008/5 n° 119, le mariage forcé : réponses du droit et enjeux juridiques, législation française et européenne.

  • Par Sahra Mekboul

Pages 83 à 98

Article de revue

  • [*] Juriste, criminologue, Centre interdisciplinaire méditerranéen d’études et de recherches en sciences sociales (CIMERSS), Aix-en-Provence.
  • [1] Cf. THÉRY, Irène, “Les trois révolutions du consentement. Pour une approche socio-anthropologique de la sexualité”, in : Les soins obligés ou l’utopie de la triple entente. Actes du 33 e  congrès de l’Association française de criminologie , Paris : Éd. Dalloz-Université Lille II, 2002, pp. 29-51.
  • [2] Cf. RUDE-ANTOINE, Edwige, Les mariages forcés dans les États membres du Conseil de l’Europe . Rapport à la Direction générale des droits de l’homme , Strasbourg : Conseil de l’Europe, 2005, 135 p., http://www.coe.int/T/E/Human_Rights/Equality/PDF_CDEG(2005)1_F.pdf
  • [3] Cf. NEYRAND, Gérard ; HAMMOUCHE, Abdelhafid ; MEKBOUL, Sahra, Les mariages forcés : conflits culturels et réponses sociales , Paris : Éd. La Découverte, 2008, 308 p. (voir p. 157).
  • [4] Loi n° 2006-399 qui s’inscrit dans le cadre d’un «  plan global de lutte contre les violences faites aux femmes  », lancé par le gouvernement le 24 novembre 2004. Elle constitue aussi le prolongement de la loi du 26 mai 2004 relative au divorce qui a mis en place la procédure d’éviction du conjoint violent du domicile conjugal (Code civil, art. 220-1).
  • [5] Cf. RUDE-ANTOINE, Edwige, Les mariages forcés dans les États membres du Conseil de l’Europe , op. cit .
  • [6] Se reporter à l’affaire devenue célèbre du «  mariage annulé pour mensonge  […] sur la virginité de l’épouse  » par le Tribunal de grande instance de Lille, le 1 er avril 2008.
  • [7] Voir la décision du Tribunal de grande instance de Dax du 6 novembre 2002 et l’arrêt de la Cour d’appel de Pau du 26 avril 2004, évoqués par RUDE-ANTOINE, Edwige, Les mariages forcés dans les États membres du Conseil de l’Europe , op. cit .
  • [8] Art. 132-80 du code pénal.
  • [9] Cf. NEYRAND, Gérard ; HAMMOUCHE, Abdelhafid ; MEKBOUL, Sahra, Les mariages forcés , op. cit ., p. 163 et annexes III. Notes juridiques 5.
  • [10] Nouveau code pénal du 26 septembre 2004.
  • [11] Voir dans le présent dossier la contribution d’Anja Bredal, pp. 99-113.
  • [12] Article 222, alinéa 2 du code pénal.
  • [13] Articles 180 et 181 du code pénal.
  • [14] Loi n° 61-1991 du code pénal.
  • [15] Voir le message de Kofi Annan, secrétaire général des Nations unies, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le 25 novembre 2004.
  • [16] Voir les instruments juridiques internationaux rapportés par RUDE-ANTOINE, Edwige, Les mariages forcés dans les États membres du Conseil de l’Europe , op. cit .
  • [17] Selon la loi algérienne, le wali représente et consent à la place de la femme. C’est une institution inconnue, entre autres, du droit français, allemand et italien.
  • [18] Voir aussi ceux rapportés par RUDE-ANTOINE, Edwige, Les mariages forcés dans les États membres du Conseil de l’Europe , op. cit .
  • [19] Article 6 de l’Einführungsgesetz zum Bürgerlichen Gesetzbuch (EGBGB), la loi sur le code civil.
  • [20] RUDE-ANTOINE, Edwige, Les mariages forcés dans les États membres du Conseil de l’Europe, op. cit.
  • [21] Ibidem.
  • [22] Cf. ANDREZ, Emmanuelle ; SPIRE, Alexis, “Droit des étrangers et statut personnel”, Plein Droit , n° 51, dossier “Entre ailleurs et ici, quels droits pour les femmes et les enfants étrangers ?”, novembre 2001, pp. 3-7.
  • [23] Cf. NEYRAND, Gérard ; HAMMOUCHE, Abdelhafid ; MEKBOUL, Sahra, Les mariages forcés , op. cit .
  • [24] Article L. 431-2, alinéa 2 du CESEDA.
  • [25] Ainsi, le droit arabo-musulman qui ne permet pas hors mariage l’établissement de la filiation à l’égard du père, lorsque ce dernier est connu, va se heurter à la loi française pour permettre à un enfant, résidant habituellement en France ou de nationalité française par sa mère, l’établissement de sa filiation à l’égard de son père naturel, ressortissant d’un pays du Maghreb. L’«  exception d’ordre public  » fait obstacle au droit arabo-musulman normalement applicable et lui substitue la loi française, permettant d’établir la paternité.
  • [26] FULCHIRON, Hugues, “De la non-reconnaissance d’un jugement de divorce assimilable à une répudiation unilatérale”, La Semaine Juridique , édition générale, n° 36, 1 er septembre 2004, pp. 1481-1487.
  • [27] Ibidem .
  • [28] LE ROY, Étienne, “Pluralisme et universalisme juridiques : propos d’étape d’un anthropologue du droit”, in : KAHN, Philippe (sous la direction de), L’étranger et le droit de la famille : pluralité ethnique, pluralisme juridique , Paris : La Documentation française, 2001, pp. 227-248.
  • [29] ARNAUD, André-Jean ; FARIÑAS DULCE, María José, Introduction à l’analyse sociologique des systèmes juridiques , Bruxelles : Éd. Bruylant, 1998, 378 p. (voir pp. 293 et ss).
  • [30] Notamment la jurisprudence sur les répudiations, en 2004.

1 Le mariage forcé est à relier à la problématique large des droits humains dans une dimension universelle. Dans la présente contribution, il est analysé au regard de l’évolution du mariage dans la société occidentale et des réponses juridiques apportées par les pays européens, souvent au croisement du droit international privé et du droit des étrangers qui posent, eux, la question complexe de l’interculturalité confrontée aux droits de l’homme et des enjeux juridiques sous-jacents.

Le mariage, une institution régulatrice

2 La plupart des systèmes juridiques accordent une grande importance au mariage en affirmant notamment son caractère fondateur de l’ordre social. Le mariage est appréhendé par le droit positif des États autant par les normes religieuses et morales que par les coutumes et les règles de mœurs. Dans sa mise en œuvre, il intervient pour régler et contrôler les nombreuses relations humaines issues du fait physique de l’existence de deux genres : masculin et féminin. En tant qu’institution, il fonctionne dans deux domaines : la régulation des relations sexuelles personnelles et la régulation de la descendance, de l’héritage, de la succession et de l’ordre social. Ainsi, la famille, qui naît du mariage, intervient comme “stabilisateur” de l’institution de ce dernier. Il n’est souvent qu’une affaire d’intérêt et ne devient mutuel, romantique, parental, poétique, affectueux, éthique et même idéaliste que très lentement. L’État cherche alors à influencer les choix familiaux en privilégiant un modèle familial avec une famille stable. Dans le code de la famille, il définit le profil de la famille, qu’il veut encourager, et se montre normatif à son égard.

3 Puis la diversification progressive des formes de constitution des couples fait reculer l’institution familiale pour voir émerger un processus d’individuation de la vie privée accompagné de l’émancipation féminine et son accès à la maîtrise de la fécondité. L’État ne s’érige plus comme une norme, mais intervient en arbitre qui accompagne les évolutions de la société. La législation est marquée par son effacement progressif de la sphère privée. Le régime juridique de la famille s’en trouve ainsi profondément modifié, le droit civil s’imprégnant de la transformation des mœurs et de la société. Cela se traduit par une amélioration de la capacité juridique de chacun des membres de la famille à exercer ses choix ou son autonomie. Ces derniers se réalisent aussi dans la sphère amoureuse. L’une des expressions les plus manifestes de cette transformation des normes et des règles de la vie privée en France, ces 40 dernières années, réside dans le changement du cadre de la pratique sexuelle légitime. Ce n’est plus l’institution du mariage qui définit l’espace légitime de la sexualité, mais la référence au libre arbitre individuel sous la forme du consentement à l’acte  [1] .

4 Dans cette nouvelle configuration des libertés le mariage forcé n’a pas de place, et lorsque son spectre surgit, les voix sont unanimes pour le dénoncer. Si les réponses du droit traduisent une prise en compte plus ou moins sérieuse du problème, il persiste, néanmoins, des contradictions inhérentes au fonctionnement même des systèmes régulateurs et démocratiques.

5 Le mariage forcé, en France et dans les pays européens  [2] , soulève des questions juridiques et sociales tant pour les victimes qui sollicitent la protection du droit interne de chaque pays que pour les praticiens du droit. Ces questions portent sur l’application du droit interne par rapport à des pratiques jugées obsolètes et leur confrontation au droit international privé au regard des avancées portées par les conventions relatives aux droits de l’homme. Car leur règlement dépend de la position des États européens — nonobstant leur souci d’alignement sur des principes qu’ils considèrent le référentiel commun des valeurs humaines, sinon universelles — et de la prise en compte de leur évolution différente sur des questions touchant à certaines de leurs valeurs (l’institution de la famille, la place de la femme). Enfin, si la prévention des mariages forcés s’est accompagnée de modifications importantes dans ces différents droits, leur application suscite une réflexion sur la pratique judiciaire dans un domaine où sont convoqués le droit des étrangers, les droits étrangers et les droits occidentaux.

6 Les règles juridiques visant à garantir le libre consentement imposent désormais plus de contraintes. En France, les modifications du Code civil et du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ( ceseda ) contiennent des mesures posant d’emblée la référence au mariage forcé  [3] . Sur le plan pénal, la loi du 4 avril 2006  [4] sur les violences conjugales introduit une voie nouvelle et permet la poursuite des acteurs du mariage forcé lorsque les agissements relèvent de cette catégorie juridique. La protection des mineurs victimes de faits de violence similaires ou d’autres liés à des pratiques traditionnelles attentatoires à leur intégrité physique et psychologique (les mutilations sexuelles féminines) est renforcée. La jurisprudence française contrôle plus sévèrement les décisions étrangères concernant la répudiation souvent connexe au mariage forcé.

Le mariage forcé et les réponses du droit en Europe

Des dispositions civiles préventives.

7 En matière de droit civil , c’est en référence aux dispositions applicables en droit de la famille que le mariage forcé est appréhendé. Ces dispositions portent sur le fond et la forme : la capacité matrimoniale, le consentement au mariage, la célébration du mariage et les nullités.

L’âge, un critère de protection

8 L’âge s’attache à des notions fondamentales telles la capacité matrimoniale, la maturité du (des) futur(s) époux, et donc leur vulnérabilité, d’où l’intérêt porté par les législations dans la prévention des mariages dits précoces et d’enfants. Elles indiquent, pour la majorité, un âge identique pour se marier, 18 ans pour les deux futurs époux. Des exceptions sont observées à Malte et au Portugal, 16 ans, et 17 ans en Turquie. D’autres pays maintiennent encore un âge légal pour contracter mariage différent pour les garçons et les filles (Luxembourg et Roumanie). La France n’a mis fin à cette différence que depuis la loi du 29 mars 2005 : 18 ans pour les deux futurs époux. Des dispenses d’âge sont accordées dans certaines législations sous condition expresse. Si plusieurs pays préconisent de relever l’âge légal et de proposer une harmonisation européenne, d’autres pensent que cette mesure est sans incidence sur ce type de mariage. En effet, dans des pays étrangers éloignés de l’Europe, en Inde et en Afrique par exemple, malgré un contexte juridique sévère et soucieux de prévenir les mariages précoces, ces pratiques persistent.

9 La Norvège a adopté une législation extrêmement sévère concernant la protection des mineurs en visant tout particulièrement le mariage forcé et le mariage d’enfant. Elle prévoit, dans la loi n° 47 du 4 juillet 1991, la possibilité pour chacun des époux de faire déclarer la nullité du mariage si ce dernier a été conclu par la force. Cette disposition n’est pas posée de manière spécifique dans les autres législations. Précisément, les demandes en nullité pour vice de consentement ou non-respect de la capacité matrimoniale sont dans la plupart des pays européens intentées par la victime. Le ministère public ne peut se saisir de l’affaire que dans des conditions expresses souvent liées à des procédures sur l’entrée et le séjour des étrangers.

L’exigence d’un consentement exempt de vice

10 Le consentement du (des) futur(s) époux, quant à lui, pose explicitement la condition centrale de la validité du mariage. À ce titre, il constitue le point nodal du mariage forcé réalisé en conséquence d’un accord non libre et non éclairé et/ou caractérisé par la contrainte (physique ou morale). Tantôt approché dans son aspect intime (la volonté interne), tantôt dans son aspect objectif (la volonté déclarée), le consentement recèle toute la complexité de la nature humaine dans ses contradictions, son ambivalence, ses désirs. Les mariages forcés, parce qu’ils s’insinuent souvent dans cette frontière invisible entre mariage arrangé et mariage imposé, placent la question du consentement comme pierre d’achoppement de la détermination juridique et sociale à les qualifier comme tels.

11 Les formulations hétérogènes pour l’aborder renvoient toutes à la notion de consentement préalable des deux parties, avec des disparités sur les précisions liées au consentement. Pour certains pays, les notions de “plein consentement” ou de “liberté dans le consentement” sont plus ou moins explicitées, mais ne s’éloignent pas de l’esprit des conventions internationales relatives aux droits de l’homme.

12 La vérification du consentement (libre et plein) impose son expression par les époux en personne et en présence de l’autorité compétente et de deux témoins (Belgique, France, Allemagne, Suisse), «  personnellement et publiquement devant l’officier d’état civil  » (Roumanie) et «  en se présentant ensemble et en personne devant l’autorité compétente et en déclarant l’intention de se marier  » (Danemark). Cette précaution est prise dans la plupart des pays européens.

13 Le mariage par procuration, encore en vigueur au Maroc, en Algérie, en République tchèque et au Portugal, induit des pratiques matrimoniales attentatoires à la liberté humaine dès lors que des personnes peuvent se retrouver mariées à leur insu. Le droit international privé, s’il permet d’évincer certaines décisions rendues à l’étranger, peut manifester quelque impasse face à cette forme de mariage.

14 C’est cette double volonté  [5] , à la fois psychologique — celle de s’engager — et déclarée, émise lors de la célébration du mariage, qui fonde la volonté interne, réelle, exempte de vice de consentement, sur laquelle les législations s’accordent pour permettre la nullité du mariage. Cette dernière est surtout posée lorsque la violence (psychologique) subie par la victime s’est interposée dans la formation du consentement et la conclusion du mariage. Les différentes pressions auxquelles la victime du mariage forcé est soumise doivent néanmoins être considérées sur le fond parce que, dans la plupart des cas, elles ont pesé sur son incapacité à résister au consentement arraché ; elles induisent un consentement au mariage qui interroge sa validité. La crainte révérencielle des parents est désormais retenue par les législations pour justifier une annulation de mariage (sauf en Belgique).

15 L’erreur sur la personne et sur ses qualités essentielles intervient comme autre cause de nullité pour vice de consentement  [6] . Là aussi, les critères d’appréciation par les juges laissent augurer d’une grande disparité dans le prononcé d’annulation de mariage. La notion de “communauté de vie” après le mariage a souvent été mise en avant pour ne pas reconnaître le vice de consentement et ne pas valider une demande de nullité, en France par exemple  [7] . Cependant, le nouveau Code civil français octroie des délais plus grands pour intenter une action de nullité. Enfin, la réparation du préjudice moral causé par la pression exercée sur la victime demeure encore difficile à faire valoir dans toutes les législations.

Une approche différenciée de la sanction pénale

16 En matière pénale , la plupart des pays européens n’ont pas fixé d’infraction spécifique pour le mariage forcé. Mais les textes de lois permettent tous, par l’extension de leur application à plusieurs délits, de le réprimer. Ils s’inscrivent cependant en aval du mariage forcé en ce sens qu’il est possible d’y avoir recours seulement après la consommation du mariage. Mais la prévention en amont se manifeste par la mise en œuvre de mesures freinant l’intention de contraindre quelqu’un à un mariage, celles s’assurant du consentement plein et libre, de l’âge des futurs époux, etc. Le viol par exemple, s’il fait l’objet de poursuites lorsqu’il est commis au sein du couple conjugal (France, Autriche, Bosnie-Herzégovine, Chypre, Hongrie) — ce qui permet de sanctionner les mariages forcés — n’est pas compris comme tel dans toutes les législations (Roumanie, Italie, Royaume-Uni).

La reconnaissance criminelle du viol conjugal

17 En France, la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 relative aux violences conjugales renforce le dispositif pénal par l’extension du champ d’application des circonstances aggravantes : «  Les peines encourues pour un crime ou délit sont aggravées lorsque l’infraction est commise par le conjoint, le concubin ou le partenaire lié à la victime par un pacs (pacte civil de solidarité). Outre les circonstances aggravantes, le viol et autres agressions sexuelles sont constitués lorsqu’ils sont imposés à la victime  [...] quelle que soit la nature des relations existant entre l’agresseur et sa victime, selon l’article 222-22 du code pénal  »  [8] . Il est punissable d’un maximum de 15 ans de réclusion criminelle. Sont compris tous les types de pénétration sexuelle sans consentement et le mariage forcé est donc considéré comme un viol entre époux.

18 La loi n° 98-468 du 17 juin 1998 prévoit l’allongement des délais de prescription pour les victimes mineures à 10 ans après la majorité. L’extension de la loi pénale concerne la poursuite à l’étranger des infractions liées à l’excision ou à d’autres mutilations sexuelles commises sur les mineurs  [9] . Par ailleurs, le «  délit de mariage blanc  » est consacré par la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003. Les articles L 621-1 à L 621-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile permettent aux préfets de saisir le procureur de la République sur le fondement du nouvel article 21 quater de l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France.

19 Les qualifications pénales de «  viol conjugal  » (Bosnie-Herzégovine), «  viol entre époux  » (Chypre), «  le viol et les atteintes à la pudeur dans le mariage  » (Hongrie) sont également très claires pour ces pays.

20 Pour la Turquie, « l es crimes sexuels  »  [10] entraînent des peines sévères. Le «  viol au sein du couple est un crime  ». Aucun ajournement ni réduction ou effacement de la peine n’est consenti si la personne enlevée ou retenue par la force est mariée avec l’accusé. Les peines sont aggravées si le viol est commis sur un mineur par un ascendant, un parent ou une personne ayant autorité. «  Les crimes contre l’intégrité sexuelle  », «  tuer une femme sous prétexte de défendre l’honneur de la famille  » et le «  crime d’honneur  » encourent la peine maximale.

21 La Norvège est un des rares pays à utiliser l’expression “mariage forcé” pour qualifier un délit  [11]  : «  Quiconque force quelqu’un à conclure un mariage, en ayant recours à la violence, à la privation de liberté, à des pressions indues ou ayant un autre comportement illicite ou en menaçant d’avoir un tel comportement est condamné pour mariage forcé  »  [12] assorti d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à six ans. Il en est de même pour les complices. Ces dispositions font partie d’un vaste programme de lutte contre les mariages forcés de mineurs.

22 Tout aussi catégoriquement, ces violations à l’intégrité physique et psychologique de la femme et de l’enfant sont comprises dans des dispositions de protection consacrées à la famille et sont sévèrement sanctionnées comme délits ou crimes (Espagne, Suède, Slovaquie).

Le mariage forcé, une violence conjugale atténuée

23 Pour les autres pays, le viol au sein du couple n’est pas compris comme tel ou est minoré dans sa qualification pénale par la désignation de violences sexuelles. En Roumanie, «  le viol et les sévices sexuels entre époux ne constituent pas une infraction pénale  », mais «  les voies de fait  »  [13] peuvent s’appliquer aux sévices conjugaux et relever du «  non-respect des normes établies en matière conjugale, d’ordre public et de sûreté publique  »  [14] . En Italie, des circonstances aggravantes sont prévues pour sanctionner «  les violences sexuelles  », «  la séquestration de personnes et les actes sexuels avec un mineur  ». La notion de viol est supprimée et remplacée par celle de violences sexuelles. Le viol entre époux n’est pas spécifiquement incriminé. Il n’existe pas de disposition spécifique pour le viol d’un mineur, l’âge de la victime n’étant pas un élément constitutif de l’infraction mais un facteur aggravant.

24 Au Royaume-Uni, le «  viol et l’infraction de pénétration  » sont régis par la loi Sexual Offences Act de 1956 et les agressions sexuelles sur mineurs par la loi Indecency with Children Act de 1960. Une nouvelle loi de novembre 2003 stipule que les circonstances sont aggravantes lorsque ces violences sont commises sur un mineur de moins de 13 ans. Les mariages forcés font partie des «  infractions sexuelles  ». Les violences dans le couple ne constituent pas des infractions spécifiques, le viol conjugal est pris en compte mais très peu d’affaires sont traitées.

25 Enfin, le déclenchement de la justice pénale, comme pour les procédures civiles, obéit tant à des facteurs internes du fonctionnement des différents appareils judiciaires européens qu’à la faculté des personnes de déposer plainte malgré les pressions dissuasives qu’elles subissent. Certaines législations prévoient que les victimes doivent saisir elles-mêmes la justice, d’autres que le ministère public peut se saisir indépendamment de la victime. Le nombre réduit de dépôts de plaintes s’explique par la crainte des victimes et les sanctions peu dissuasives : très peu d’emprisonnement, des peines relativement courtes et une prise en compte très minime des préjudices moraux.

26 Cependant, une évolution des mentalités semble progresser vers une reconnaissance plus nette du phénomène. La justice de Sierra Leone a retenu le mariage forcé comme chef d’accusation dans l’ensemble des crimes contre l’humanité  [15] . De la même manière, l’Allemagne sanctionne d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à dix ans les auteurs de mariages forcés. Ce point introduit la nécessité d’une évaluation de la violence utilisée dans la contrainte et de la vulnérabilité des victimes (âge, etc.). Un consensus se dégage quant à une réflexion plus approfondie sur la manière d’envisager des outils facilitant l’application des lois plutôt que la création de conventions  [16] dont on constate la portée limitée. Car si beaucoup de pays ont ratifié ou signé des conventions relatives à la sauvegarde des grands principes de liberté et d’émancipation des hommes, ils peuvent aussi maintenir des pratiques en contradiction avec elles.

27 Mais au-delà de leur traitement territorial, les droits internes sont soumis à l’exercice plus complexe de règlements de situations de conflits de droit, dès lors que le mariage forcé interpelle des conceptions étrangères du droit et leur application. Ce qui conduit à les appréhender au regard du droit des étrangers et du droit international privé. Cette proximité des termes et leur usage circonscrit aux mariages forcés créent des interférences sur les droits des personnes eux-mêmes.

Entre droit international privé et droit des étrangers

28 Les mariages forcés révèlent toute la difficulté de l’application du droit lors de la prise en compte de pratiques familiales jugées illégitimes en vertu des règles de droit interne ou international privé. Lorsque les instances judiciaires des pays européens sont confrontées à ces situations, elles sont amenées à faire reconnaître, en droit interne, des effets à des unions qui contrarient les droits de l’homme.

Le statut personnel, source de discrimination

29 C’est d’abord autour du statut personnel que réside cette confrontation des droits, que se cristallise la question des mariages forcés et que les conceptions s’opposent très nettement dans le domaine du droit de la famille. Le statut personnel n’est en effet pas envisagé de la même manière par les différents États, ce qui interfère sur la qualification des institutions juridiques concernées et sur le droit applicable lui-même, à savoir la question du rattachement qui en découle. Cette situation s’avère tout particulièrement posée avec l’application du droit étranger lorsque «  l’exception d’ordre public  » est mise en œuvre par les juridictions européennes pour s’y opposer. Dans la recherche de solutions aux conflits de droit ou de coutume, les tribunaux ont pu s’abriter derrière l’ordre public pour écarter une loi ou une coutume qui heurte les critères de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Cependant, dans les relations privées comme dans l’institution du droit de la famille, l’exception d’ordre public international ne peut intervenir que s’il permet la protection des personnes. Tout ce qui est maintenu apparaît comme un ordre public justifié pour la protection d’un droit de l’époux le plus faible ou la protection de l’enfant dans le droit de l’autorité parentale.

30 Par ailleurs, l’application par les tribunaux des dispositions spécifiques internes à leur pays s’exerce avec plus ou moins de similitude et d’équité, ce qui n’est pas sans effet sur le droit international privé, créant de l’instabilité juridique et pour les justiciables et pour les professionnels du droit.

Le critère du rattachement pertinent

31 En France, les insuffisances du droit régissant la situation des femmes étrangères ont pu révéler des inégalités de traitement et des préjudices importants dans l’application des codes de la famille de certains pays (Maghreb et Afrique notamment), défavorables aux femmes sur de nombreux points. Les femmes binationales, bien que possédant la double nationalité, sont soumises à la loi de leur pays d’origine qui leur appliquera, si elles s’y trouvent, le même régime juridique qu’à ses autres ressortissants. De même, par procuration, le mariage d’une femme étrangère vivant en France ou dans un autre pays d’Europe peut être célébré contre son gré dans son pays d’origine. La règle de conflit de loi qui désigne la primauté de la loi nationale a été souvent privilégiée. Et bien que le droit international privé recommande l’application du droit du pays du domicile, ce droit reste trop peu utilisé et/ ou souvent méconnu des acteurs sociaux et des spécialistes du droit.

32 Ainsi, pour la résolution de conflit de droit, les pays européens adoptent des critères différents qui peuvent faciliter ou, au contraire, compliquer l’application du droit le plus favorable. Tout comme la France, la Belgique, l’Allemagne, l’Italie, la Grèce, le Luxembourg et les Pays-Bas privilégient la loi nationale comme règle de conflit pour les conditions de fond du mariage, d’autres pays font valoir la loi du domicile (Grande-Bretagne, Malte, pays de Common Law et pays scandinaves). L’Espagne propose le choix entre ces deux critères. En Suisse, le rattachement est réalisé par l’application de la loi nationale de manière distributive ou cumulative. Enfin, pour les conditions de forme, la plupart des pays, dont la France, retiennent la loi du lieu de célébration du mariage.

33 Toutes ces difficultés sont inhérentes à la nature même du droit : certaines dispositions étrangères s’avèrent difficilement transposables dans les catégories juridiques de l’État. Ce qui se traduit par la mise en œuvre de la règle de conflit de loi ( exequatur ). La disposition permettant un mariage par procuration, évoqué plus haut, est révélatrice. Rappelons que le mariage par procuration renvoie à la question de la place de la volonté au moment du consentement au mariage. En outre, ce mariage est possible au Portugal et interdit en Croatie. La question posée est donc de savoir si le mariage par mandat constitue une condition de fond ou une condition de forme. L’institution du wali  [17] en Algérie rend compte de cette même difficulté de transposition dans les systèmes juridiques qui l’ignorent. Dans le premier cas, il s’agira de faire admettre une autorisation dans un pays qui l’interdit. Pour le second, cette situation traduit la contradiction portée relativement au principe du consentement qui doit être exprimé «  en personne  » et «  libre  », au regard des instruments juridiques internationaux.

34 Les exemples sont nombreux de l’intervention de l’ordre public à l’égard d’une loi étrangère comme celle qui autoriserait le mariage d’un mineur  [18] . Ainsi, le mariage d’une fille roumaine âgée de 16 ans et d’un garçon roumain de 18 ans, accepté en Roumanie, est non valable en Suède mais l’est en Allemagne, pays qui retient la capacité à se marier au regard du droit roumain. La reconnaissance du mariage, dans ce cas, se fait malgré la violation de principe de l’ordre public allemand  [19] . «  La violation de l’ordre public allemand ne peut être présumée puisque la loi allemande autorise le mariage à 16 ans sous certaines conditions  »  [20] . Pourtant, «  la référence à l’ordre public n’élimine pas le fait qu’il existe dans le droit roumain un traitement discriminatoire entre la fille et le garçon  »  [21] . En pratique, le plus souvent, l’application d’une loi étrangère discriminante en raison du sexe se heurte à l’exception de l’ordre public.

Les effets contraires de l’ordre public

35 Mais l’ordre public est sollicité de manière très différenciée selon l’émanation du droit étranger concerné. Dans le droit musulman, le statut personnel produit des entorses certaines au principe d’égalité entre les personnes que le droit international privé corrige en garantissant des solutions juridiques compatibles avec le respect des droits fondamentaux. Cette application juridique se heurte, cependant, à des impératifs posés par les lois et règlements relatifs à l’entrée et au séjour des étrangers qui entravent régulièrement l’exercice des droits auxquels ils peuvent prétendre au regard du droit international privé  [22] .

36 Le droit des étrangers peut renforcer les effets discriminants du statut personnel  [23] . La répudiation et la polygamie traduisent cette situation. Une femme arrivée en France par le biais du regroupement familial peut, durant les deux années qui la séparent de la possibilité d’obtenir ses propres papiers, devenir l’otage de son époux, vivant sous la menace de la répudiation. De même, quand cette répudiation est avérée, le renouvellement de son titre de séjour prévu par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile  [24] est vicié par la condition imposée par la loi de faire valoir la rupture de la vie conjugale pour cause de violence, quand on sait la difficulté pour apporter la preuve de la violence morale dans ces cas précis.

37 Dans le même code, les dispositions contenues dans la loi du 24 août 1993 concernant le traitement de la polygamie peuvent obstruer certains droits. L’interdiction de la polygamie s’est accompagnée de mesures administratives de police très restrictives pour obtenir ou renouveler un titre de séjour. Désormais, seuls l’époux et la première épouse peuvent prétendre à ce renouvellement sous certaines conditions, les autres épouses devant faire la preuve d’une décohabitation effective et réelle, aux conséquences multiples. Par ailleurs, cette situation révèle quelque incohérence du système juridique français, liée, d’une part, à la reconnaissance par le droit international de la validité de ces unions polygames (celles contractées avant la loi), et, d’autre part, à la réglementation sur l’entrée et le séjour qui fait de la polygamie un motif de retrait ou de renouvellement du titre de séjour. En pratique, c’est souvent la seconde prérogative qui prévaut, et hormis les problèmes rencontrés lors de la décohabitation, les épouses se retrouvent dans l’incapacité de faire valoir certains de leurs droits : droit au divorce, contribution aux charges de mariage, liquidation du régime matrimonial, etc.

38 La répudiation, parce qu’elle interfère dans le champ du règlement du divorce demandé par l’époux, constitue, pour les femmes victimes d’un mariage forcé, une double difficulté : faire admettre la contrainte dans le mariage et/ou la répudiation, et la discrimination en raison du sexe dont elles sont victimes. L’application du droit des étrangers procède de même en empêchant les épouses polygames de faire valoir une protection administrative et juridique plus grande, que devrait garantir le droit international privé compte tenu de leur position discriminée.

39 Ces aberrations produites par le même droit censé protéger les personnes s’analysent dans la confrontation de «  l’ordre public  » en droit des étrangers et en droit international privé pour motiver les décisions. Pour ces deux droits, l’«  ordre public  » renvoie à des approches très différentes dont les effets peuvent s’avérer contradictoires. En matière de police administrative des étrangers, il revêt un caractère essentiellement répressif : priver d’accès au territoire ou de droit au séjour un étranger qui constitue «  une menace à l’ordre public  ». En droit international privé, en revanche, l’exception d’ordre public international est déclenchée pour faire échec à l’application d’une loi étrangère lorsque celle-ci contrarie les principes fondamentaux du droit interne français  [25] .

Concilier la protection des droits humains et la diversité des systèmes juridiques

40 Le mariage forcé est donc aujourd’hui observé dans le sens d’un réajustement tant du point de vue humain que du droit lui-même. Comme d’autres pratiques coutumières pouvant y être associées et entraîner une exaspération du droit, il tend à convoquer plus directement des principes sacrés comme celui d’“égalité” ou d’“ordre public”. Le rappel de certains droits inaliénables de la personne humaine et des libertés fondamentales réaffirme la question de l’égalité entre l’homme et la femme conçue par les pays occidentaux comme impliquant une identité de droits et de devoirs. Ce principe d’égalité conduit naturellement à écarter non seulement les lois étrangères qui ne reconnaîtraient pas les mêmes droits aux époux, mais encore toute loi qui édicterait des règles différentes pour l’homme et pour la femme. Cependant, toute tentative qui consisterait à appréhender le mariage forcé et sa sanction selon une logique d’opposition culturelle figée serait une dérive du fait qu’elle ne tient pas compte de l’effort d’intégration des populations immigrées à la société d’accueil.

41 Par ailleurs, la neutralisation systématique d’une loi étrangère qui présenterait une formulation ambiguë en la considérant dans une conception étroite de l’égalité homme/femme n’irait pas sans heurter les conceptions d’autres sociétés, telles les sociétés musulmanes “traditionnelles” pour lesquelles l’égalité est plutôt conçue en termes de spécificité et de complémentarité des statuts de l’homme et de la femme, dans la famille et la société. Si la répudiation s’avère une institution inégalitaire, les tribunaux doivent pouvoir apprécier avec objectivité si un certain équilibre juridique est réalisé ou non par le système juridique en cause. Sans quoi s’exacerbe l’opposition de systèmes qui ne seraient pas fondés sur des valeurs communes (la Convention européenne des droits de l’homme, l’Europe). Selon Hugues Fulchiron, cela favoriserait «  l’émergence de nouvelles frontières non plus sur des motifs de nationalisme juridique, mais, paradoxalement, d’universalisme juridique  »  [26] . Et en l’absence de communauté juridique — celle des droits de l’homme — tout effort de coordination des systèmes est voué à l’échec : «  La question des conflits de lois dégénère alors en conflit de civilisations et risque de raviver le débat sur l’universalité des droits de l’homme  »   [27] .

42 Le pluralisme est un enjeu juridique majeur. Ainsi, entre conception européenne et conceptions étrangères du droit se profile un espace social et juridique ouvrant sur des conceptions où l’universalisme et le pluralisme comme notions complexes pour envisager les rapports humains et leur traduction juridique s’opposent dans un rapport égalitaire et complémentaire. Cet argumentaire qui milite pour un pluralisme juridique met en évidence «  la pluralité des appartenances sociales et leur inéluctable concurrence, supposant des choix et des réponses construites selon le principe de l’opposition (cas le plus fréquent), de la dialectique (en découvrant un élément commun dans les facteurs en concurrence)  » et leur possible transformation «  en “dialogie”, c’est-à-dire en un dialogue où la découverte de l’autre et la prise en compte de l’altérité s’imposent avant le souci d’échange d’informations  »  [28] . Le pluralisme est alors envisagé en réaction au principe d’unité héritée du judaïsme monothéiste. C’est ce principe d’unité acceptée, imposée ou contestée, qui prévaudrait dans la pensée moderne et qui persisterait même dans les divers jeux d’oppositions.

43 Le dualisme “universalisme/relativisme” est surtout posé pour caractériser et dénoncer les conceptions qui imposent l’adhésion à l’universalisme proclamé des droits de l’homme (ceux de 1789, puis de 1948). Défendant, au nom du respect de l’altérité, la validité de toutes les constructions culturelles comme égal apport à l’organisation des sociétés, le relativisme récuse un cadre d’exposition qui se présente comme universel mais qui est d’origine, de facture et (éventuellement) de validité occidentale contre les autres cultures.

44 De même, l’opposition “universalisme/particularismes” permet de percevoir la volonté implicite de suprématie de l’universalisme des droits de l’homme, dans une logique de transposition des modèles juridiques des pays du Nord vers des pays du Sud accordant peu de place à l’expression des spécificités de ces derniers. Cela peut être nuancé par «  une acception plus positive, les particularismes et l’universalisme peuvent receler des liens intéressants, analysés dans le cadre d’un autre rapport entre le mondial et le local, rapport non pas oppositionnel mais dialectique  »  [29] .

45 Enfin, les tribunaux européens ont pu révéler des conceptions du droit influencées par le relativisme culturel interprétées dans l’opposition “universalisme/relativisme”. Ainsi, les revirements jurisprudentiels, enregistrés ces dernières années en France dans le domaine du droit de la famille  [30] , traduisent l’inconfort de la justice face à des situations qui font régulièrement référence à des normes d’une autre aire géopolitique. Les institutions judiciaires s’érigent alors tantôt pour le respect de la culture et la tradition des États, tantôt pour l’application stricte des principes fondés sur des valeurs communes. Suspectées de relativisme culturel, les décisions des juges se sont peu à peu durcies, brouillant quelque peu les repères juridiques. Ce qui révèle aussi la contradiction inhérente à toute société démocratique dans sa recherche permanente du subtil équilibre entre tolérance et refus de l’intolérance.

46 Pour sortir de cette impasse, la conception dialogale retient l’ouverture des approches du droit et des droits de l’homme à l’altérité et au pluralisme de manière à mutualiser les approches occidentales et les apports d’autres traditions humaines dans une prise de conscience de la complexité des problématiques des droits de l’homme, des mécanismes juridiques et sociétaux entre dynamiques locales et dynamiques globales.

47 Et cela s’impose au nom d’une double exigence : la nécessité de garantir la protection des droits humains et l’impératif de maintenir l’équilibre juridique international.

Citer cet article

  • MEKBOUL Sahra ,
  • Mekboul Sahra ,
  • Mekboul S. ,

https://doi.org/10.3917/migra.119.0083

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L’articulation entre le mariage et le PACS en droit français

c.anno 28 juin 2011 Droit de la famille

Si le droit français a fait le choix de permettre à un couple de s’exprimer et de vivre son union à travers plusieurs formes juridiques que sont le concubinage, le PACS et le mariage, c’est pour reconnaître officiellement la diversité des aspirations des Français et pour leur offrir des règles de droit adéquates à la nature de leur engagement.

Cependant, si le concubinage constitue une union de fait qui est reconnue par le droit et plus précisément définie à l’article 515-8 du Code civil, deux institutions du droit français  permettent de célébrer juridiquement une union et de lui offrir un véritable régime: il s’agit du pacte civil de solidarité (PACS) et du mariage.

Au départ, dans l’esprit des promoteurs du PACS, cette dualité visait à permettre l’ouverture d’une union réservée aux homosexuels ; cependant, la loi du 15 novembre 1999 a présenté le PACS comme un contrat ouvert à toutes sortes de couples, quelle que soit la nature de leur orientation sexuelle. Mais de cette loi, de l’interprétation qu’en a faite le Conseil constitutionnel, et de la loi du 23 juin 2006 qui l’a complétée, il ressort que le PACS est en réalité une institution proche à bien des égards du mariage. Cette neutralité à l’égard de l’orientation sexuelle et la proximité de ces deux unions ont nécessairement entraîné une concurrence entre elles.

Toutefois, la conjonction d’une part du choix du PACS par des couples hétérosexuels et d’autre part de la revendication par des couples homosexuels de l’accès au mariage révèle que l’articulation entre ces deux institutions est complexe et que de nombreuses différences demeurent entre ces deux types d’unions.

Sans prétendre à l’exhaustivité, et sans aborder la question sous l’angle d’un réquisitoire quant à l’évolution future du droit, il est actuellement nécessaire de revenir sur la manière dont il convient d’appréhender en l’état du droit positif l’articulation entre le PACS et le mariage.

I.   La proximité des deux institutions permettant l’union d’un couple en droit français

La proximité entre le PACS et le mariage se retrouve à la fois dans l’application de dispositions communes et dans leur signification axée autour de la notion de sentiment.

A.   L’application de dispositions communes au PACS et au mariage, reflet de leur proximité

Cette proximité entre le PACS et le mariage se révèle à la fois dans l’accès à ces institutions et, dans une certaine mesure, dans le régime qui doit leur être attaché.

1.   La proximité des conditions du PACS et du mariage

Si l’arrêt K orosidou c/ Grèce rendu 10 février 2011 par la Cour européenne des droits de l’Homme a qualifié le mariage et le PACS de « contrats », il convient de nuancer considérablement cette appréciation. En effet, en droit français, ces deux unions ne peuvent exister sans des formalités préalables et par simple application du principe traditionnel du consensualisme.

Existent en effet des conditions de fond et des conditions de forme importantes qui révèlent la dimension comparable de ces deux unions..

Or, il est incontestable que les conditions de fond du PACS sont calquées sur celles du mariage. Ainsi, le PACS et le mariage supposent tous deux une union exclusive du point de vue juridique : le PACS ne peut être conclu qu’entre deux personnes à peine de nullité absolue, ce qui nous semble évident mais en dit long sur sa nature réelle. Et de la même manière que la monogamie est exigée pour la célébration d’un mariage, l’existence d’un premier PACS ou d’un mariage encore en vigueur fait obstacle à la célébration d’un second PACS.

Cette ressemblance entre ces deux institutions est encore accentuée par la reprise des conditions de fond relatives à la prohibition de l’inceste : les interdits à mariage existent également en droit du PACS entre ascendants et descendants, entre alliés en ligne directe, et entre collatéraux jusqu’au 3 e degré. Ils y apparaissent même renforcés, puisqu’aucune dispense n’est possible.

Mais la célébration d’un PACS appelle également des conditions de forme qui ressemblent à celles du mariage : sont ainsi nécessaires au mariage des formalités prénuptiales faisant intervenir les époux devant l’officier d’état civil, et appelant la société à témoin pour ne pas méconnaître le caractère social de ce lien de famille. De la même manière, des partenaires qui souhaitent conclure un PACS doivent accomplir plusieurs étapes parmi lesquelles une convention écrite enregistrée par le greffe du tribunal de grande instance (TGI), une déclaration conjointe devant celui-ci et également enregistrée par ses soins. Le rôle du greffe du TGI est comparable à celui de l’officier d’état civil dans le mariage, puisque tous deux vérifient la qualité du consentement des partenaires et les conditions de leur union.

Prolongeant cet esprit général de publicité et de reconnaissance, la loi du 23 juin 2006 qui a modifié le PACS a rendu nécessaire l’inscription de cette union dans l’état civil des partenaires, montrant qu’il s’agit d’une institution établissant un véritable lien de famille et non d’un simple contrat.

Et enfin, la célébration publique et officielle de leur union par des partenaires ayant recours au PACS montre bien l’attitude de la société à son égard. Cette pratique rappelant celle des fêtes organisées pour des mariages révèle un véritable rapprochement du régime de ces deux institutions.

2.   Un rapprochement du régime de ces unions

En plus de se révéler dans les conditions d’accès au PACS et au mariage, cette proximité se retrouve également dans les dispositions applicables à ces unions.

Ainsi, la loi du 29 juillet 1994 a permis d’ouvrir l’assistance médicale à la procréation à la fois aux couples mariés, pacsés et aux concubins (présentant au moins deux ans de vie commune). De même, la loi du 12 mai 2009 a étendu au droit du PACS la compétence du juge aux affaires familiales. Et enfin, la loi du 24 novembre 2009 a permis au greffe du TGI, comme c’était le cas pour l’officier d’état civil dans le droit du mariage, de célébrer le PACS au domicile des partenaires.

Mais les dispositions juridiques relatives aux conditions d’accès à ces institutions et aux droits ouverts aux partenaires ne suffisent pas à appréhender la proximité de ces deux unions. Ce qu’il est indispensable de souligner, c’est qu’il apparaît désormais qu’aussi bien le PACS que le mariage se présentent comme des unions fondées sur le sentiment réciproque des personnes qui s’engagent dans ces liens.

B.   Une signification commune indéniable : des couples fondés sur des sentiments partagés

Si les couples permis par le PACS et le mariage apparaissent fondés sur le sentiment qui anime leurs partenaires, c’est en raison de la proximité indéniable du contenu et de la portée de ces unions.

1.   Une proximité indéniable du contenu de ces unions

La proximité entre le PACS et le mariage se retrouve indéniablement à la fois sur un niveau personnel et sur un niveau patrimonial.

a) Aspect personnel

Au niveau personnel, aussi bien le PACS que le mariage mettent en place un devoir central de communauté de vie (de toit et de lit), auquel il ne peut être apporté d’exceptions qu’en cas de raisons professionnelles ou de violences conjugales.

De la même manière, les devoirs d’assistance matérielle, de secours, de contribution aux charges du ménage se retrouvent à la fois dans le PACS et dans le mariage et permettent de soutenir moralement l’autre dans les moments difficiles de l’existence et d’équilibrer matériellement les conditions de vie des partenaires.

b) Aspect patrimonial

Cette proximité se retrouve également au niveau de l’aspect patrimonial, car de la même manière que le mariage met en place une communauté de biens supplétive de volonté entre les époux, le PACS permet d’instituer une indivision qu’il est possible d’accentuer. A titre supplétif, elle comprend les biens acquis par les partenaires pendant le PACS, à l’exception de biens personnels.

Si, contrairement au mariage, chaque partenaire reste seul tenu des dettes personnelles nées avant et pendant le PACS, l’article 515-4 du code civil permet d’instituer en droit du PACS une solidarité des dettes ménagères qui sont nées pour les besoins de la vie courante.

2.   Le renforcement de la proximité de la portée de ces unions

Cette proximité entre le PACS et le mariage a encore été accentuée au cours des dernières années. En effet, comme cela a été évoqué plus haut, des dispositions du mariage telles que la compétence du juge aux affaires familiales ont été étendues au PACS. Mais de manière symétrique, si le PACS se caractérise par sa liberté de rupture, le mariage a perdu un peu de sa spécificité et de son inscription dans sa durée. Ainsi, la loi du 23 juin 2006 a encore renforcé la dédramatisation du divorce et la concentration des effets de la rupture, ce qui a atténué son intensité et sa portée dans le temps.

Toutefois, le mariage et le PACS demeurent deux institutions distinctes qui permettent d’établir des unions différenciées.

alliance

II.   Le mariage et le PACS, deux institutions distinctes permettant des unions différenciées

Puisque le mariage et le PACS demeurent des institutions distinctes par les divergences subsistantes quant à leur intensité et à leur portée, il convient de s’interroger sur l’avenir de ces différences.

A.   Le maintien de divergences d’intensité et de portée fondamentales

Existent encore entre le PACS et le mariage des différences fondamentales à la fois dans les rapports interindividuels qu’ils établissent et dans leur portée à l’égard des tiers.

1.   Un mariage plus intense dans les rapports interindividuels qu’il établit

Le mariage se présente d’abord comme une union plus stricte que le PACS, puisqu’il est seul à établir un devoir de fidélité.

Mais il apparaît surtout comme une union plus intense en ce qu’il établit des devoirs mutuels, inconditionnels, qui doivent être respectés par les époux, et ce quelle que soit l’attitude de l’autre. A l’inverse, le PACS établit des devoirs réciproques, reposant sur une logique proprement synallagmatique, celle du « do ut des ».

Cette intensité des devoirs diffère également dans leur sanction. A titre d’exemple, le mariage permet de recourir à des procédures d’exécution renforcées du devoir de secours puisque les obligations alimentaires sont vitales. A l’inverse, il n’existe aucune sanction spécifique et rigoureuse du devoir d’aide matérielle qui existe dans le PACS.

Ces divergences quant au contenu de ces unions se retrouvent également et surtout dans les conditions de leur rupture. En effet, la rupture du mariage est nécessairement judiciaire, fait appel à un juge afin d’organiser la vie après celle-ci et d’éviter dans la mesure du possible les violences, les tensions, les déséquilibres qu’un divorce peut susciter. Au contraire, la rupture d’un PACS peut être beaucoup plus brutale, ne nécessite pas de recours au juge et s’apparente en ceci, comme a pu l’estimer le Conseil constitutionnel, au droit de résiliation unilatérale d’un contrat à durée indéterminée… Cette facilité de rupture, bien qu’appréciée par certains couples, est-elle en adéquation avec la logique institutionnelle de sentiments partagés qui semble animer le PACS ?

Enfin, le mariage se différencie également du PACS quant à la portée de ses effets après la rupture. En effet, le devoir de secours du mariage, qui permet d’équilibrer les niveaux de vie, se prolonge après le divorce par l’attribution éventuelle d’une prestation compensatoire.

Toutefois, le mariage n’est pas seulement plus intense que le PACS quant à son contenu et à sa rupture, mais aussi et surtout dans sa portée.

2.   Le prolongement du mariage au-delà de rapports interindividuels: la fondation d’une famille

La spécificité réelle, fondamentale et incontournable du mariage par rapport au PACS consiste en son prolongement à la fois dans l’alliance, et dans la filiation.

a) Le prolongement du mariage dans l’alliance

C’est ce prolongement du mariage dans l’alliance qui explique que nombreux soient les auteurs à l’avoir qualifié de « maillage fondamental du lien social ». Un mariage n’unit en effet pas seulement deux époux, mais établit également une alliance entre leurs familles respectives. Une alliance qui peut être plus ou moins prononcée et effective sur le plan factuel, mais qui est consacrée en droit par plusieurs dispositions : il en va ainsi de la mise en place d’interdits à mariage entre le gendre et sa belle-mère, et entre la bru et son beau-père, ou encore, comme le dispose l’article 206 du Code civil, de l’établissement d’obligations alimentaires à l’égard des ascendants de son conjoint.

b) Le prolongement du mariage dans la filiation

Mais le mariage, qualifié en ceci de « certificat d’aptitude parentale » par le doyen Carbonnier, se prolonge aussi et surtout dans la filiation. Lors de la célébration de la cérémonie, l’officier d’état civil lit ainsi notamment l’article 213 du Code civil, selon lequel les époux assument la direction matérielle et morale de la famille, mais aussi l’article 371-1 du même code, qui est relatif à l’autorité parentale exercée par les époux sur l’enfant.

Ceci révèle que le mariage n’institue pas seulement une union horizontale entre des conjoints, mais permet également la fondation d’une famille.

Or, la conception que le Conseil constitutionnel prône de l’égalité montre qu’une différence de situation permet d’établir des différences de traitement. Quelle est donc la portée des différences entre le PACS et le mariage ? Quelles sont les différences de traitement qu’elles vont permettre ? Quel peut être leur avenir en droit français ?

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B.   La portée des divergences entre le mariage et le PACS

Les divergences entre le mariage et le PACS, qui permettent de leur appliquer des régimes différenciés à certains points de vue,sont controversées tant dans leur nature que dans leurs effets; il convient dès lors de se poser la question de leur avenir en droit français.

1.   L’application d’un régime différencié

L’article 212 du Code civil (relatif au devoir de fidélité) et l’article 371-1 (relatif à l’autorité parentale) permettent de justifier la présomption de paternité « pater is est » selon laquelle le mari de la mère d’un enfant est présumé être le père de celui-ci.

Et selon la décision rendue le 6 octobre 2010 par le Conseil constitutionnel, c’est ce même prolongement du mariage dans la filiation qui justifie, conformément à l’interprétation de l’article 365 du Code civil, que l’adoption soit réservée à un couple marié.

Cette spécificité du mariage, qui explique l’exclusion du recours à l’adoption par les couples homosexuels, a été avalisée à la fois par le Conseil constitutionnel dans la décision précitée et par la Cour européenne des droits de l’Homme dans une décision Schalk et Kopf c/ Autriche en date du 24 juin 2010 en raison des divergences actuelles entre Etats. Cependant, une évolution de cette position n’est pas à exclure puisque la Cour de Strasbourg se caractérise par l’interprétation évolutive qu’elle fait de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Or, l’attitude de la société à l’égard de l’union homosexuelle, voire de l’homoparentalité, a indéniablement évolué vers une plus grande tolérance.

2.   L’avenir de ces divergences

La poussée à la fois individualiste et égalitaire de notre société conduit aujourd’hui à se poser de nombreuses questions sur l’avenir des divergences entre le PACS et le mariage. Certains suggèrent ainsi d’offrir un type inédit et unique de couple, ouvert à tous, affirmant sa neutralité sur l’ouverture sexuelle des partenaires. Cette proposition répondrait aux revendications des partenaires homosexuels et présenterait le mérite de permettre une égalité totale et inconditionnelle entre différents couples. Toutefois, si cet objectif est compréhensible, louable et légitime, n’est-il pas bon de se souvenir que le pluralisme permet de répondre à la diversité des aspirations des couples, à la spécificité de leurs engagements, et à leur volonté d’organiser leur avenir commun ? Ne faut-il pas se rappeler de la phrase énoncée en 1978 par le doyen Carbonnier « à chacun sa famille, à chacun son droit »  ? Ne peut-on pas penser que le pluralisme se pose en garant de la liberté ?

Cependant, il est vrai qu’en l’état du droit positif, le PACS présente des inconvénients : premièrement, d’un point de vue juridique, sa neutralité quant à son ouverture sexuelle permet aux couples hétérosexuels de donner la vie à des enfants et de les accompagner jusqu’à leur majorité sans que le droit ne prenne en compte toute la dimension familiale de leur union.

Ensuite, la rupture facile et rapide du PACS présente des avantages pour des couples qui ne sont pas sûrs de leur engagement, ou qui ont déjà vécu les troubles d’un divorce, mais est lourde de conséquences pour des partenaires qui se retrouvent subitement et brutalement délaissés par celui avec qui ils souhaitaient partager leur avenir.

Et enfin, la différence d’intensité du PACS et du mariage dans leurs devoirs et dans leur signification symbolique permet une fois de plus de comprendre les revendications de couples homosexuels qui souhaitent que leur soit offerte l’ouverture d’un véritable mariage comportant en outre toute une dimension familiale. Certes, l’Assemblée nationale a récemment fait connaître son opposition à un tel projet. Cependant, alors que dans certains pays comme en Espagne, le mariage homosexuel est permis, alors que le Sénat de l’Etat de New York vient de le légaliser, alors que les Etats membres du Conseil de l’Europe sont en attente d’une décision à ce sujet de la Cour de Strasbourg, il conviendra d’en réfléchir et d’en débattre en tenant compte de nos traditions juridiques, mais aussi et surtout des aspirations des Français ainsi que des impacts juridiques, personnels et sociaux d’une telle réforme.

Clara Bourgi

Licence 3 en droit mention Juriste européen et collège de droit

Université Paris II Panthéon Assas

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    Le consentement au mariage « Il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a point de consentement »-Article 146 du Code Civil. Dés lors, pour pouvoir se marier les futurs époux doivent donc consentir tous les deux au mariage. Le mariage civil est une forme de mariage dans lequel une autorité publique reconnait la validité de l'union. Il ...

  12. Le mariage, un « contrat perpétuel par sa destination » (Portalis)

    Au surplus, à travers sa brochure intitulée De la législation sur le mariage et sur le divorce (1802), Nougarède estimait que le projet du Tribunal de cassation n'offrait « que des lois arbitraires dans la dissolution » du mariage .

  13. DALLOZ Etudiant

    Jurisprudence. La validité du contrat de mariage est soumise au droit commun des contrats, exigeant un consentement non vicié. Civ. 1re, 24 nov. 1993, Bull. civ. I, n° 342 ; D. 1994. Jur. 342, rapport. J. Thierry ; Defrénois 1994, art. 35856, p. 896, obs G. Champenois ; D. 1995.

  14. PDF Le devoir conjugal : un déni du consentement ? 27 Couple et sexualité

    le mariage, les rapports sexuels ne sont d'ailleurs pas seulement présup-posés, puisque les époux sont tenus à une communauté de vie, ce que la doctrine juridique a défini comme la réunion d'une « communauté de toit et de lit [1 ; 2] ». L'interdiction générale de rapports sexuels imposés Dès le Code pénal de 1810, les

  15. Les conditions de forme et la preuve du mariage Fiches/Cours

    Le mariage est un acte juridique par lequel un homme et une femme établissent entre eux une union dont la loi civile règle impérativement les conditions, les effets, et la dissolution. C'est un acte juridique formaliste, il ne se forme pas par le seul échange des consentements. Il faut respecter un certain formaliste.

  16. La liberté et le droit au mariage

    Il est possible aujourd'hui de le définir comme « un acte juridique solennel par lequel un homme et une femme d'un commun accord, décident de s'unir et d'adhérer à un statut légal préétabli, celui de gens mariés ». La principale caractéristique du mariage est la liberté.

  17. Dissertation sur le mariage

    Au sens juridique le mariage c'est l'acte juridique solennel par lequel un homme et une femme établissent une union, union organisée par la loi civile et dont la rupture ne peut être obtenue que dans les conditions définies par cette même loi civile. Les couples mariés sont composés d'un conjoint et d'une conjointe. L'une des ...

  18. Dissertation le consentement au mariage

    Le consentement au mariage. &quot;Il n&#039;y a pas de mariage lorsqu&#039;il n&#039;y a point de consentement&quot;. Ainsi, selon l&#039;article 146 du code civil, le consentement est une qualité essentielle à la validité du mariage. Ce consentement doit être libre, non vicié et sincère pour être valable.

  19. Le mariage forcé : réponses du droit et enjeux juridiques

    Dans la présente contribution, il est analysé au regard de l'évolution du mariage dans la société occidentale et des réponses juridiques apportées par les pays européens, souvent au croisement du droit international privé et du droit des étrangers qui posent, eux, la question complexe de l'interculturalité confrontée aux droits de l'homme et des...

  20. Dissertation droit civil

    Les conditions de fond du mariage au XXIe siècle. Le mariage est un acte juridique qui crée le statut de mari et femme (acte de mariage) et implique des accords testamentaires. Le mariage est également une situation juridique dans laquelle l'union d'un homme et d'une femme est conclue dans la forme prescrite par la loi.

  21. L'articulation entre le mariage et le PACS en droit français

    Si le droit français a fait le choix de permettre à un couple de s'exprimer et de vivre son union à travers plusieurs formes juridiques que sont le concubinage, le PACS et le mariage, c'est pour reconnaître officiellement la diversité des aspirations des Français et pour leur offrir des règles de droit adéquates à la ...

  22. Doc Du Juriste sur le thème contrat de mariage

    Le contrat de mariage est une convention par laquelle les futurs époux fixent le statut de leurs biens pendant le mariage, et le sort de ces biens à la dissolution. Sont envisagés les rapports entre époux et à l'égard des tiers, principalement au regard de la propriété et...

  23. Dissert Civil TD 04 la nullité du mariage

    La nullité relative est réservée à des situations ou conditions d'un mariage ne remplissent pas des critères stricts de la nullité absolue, mais qu'il y a tout de même un vice du consentement, la nullité relative peut être la seule voie disponible.